au delà du portrait - static.fnac-static.com · le vieil homme est assis, de face, légèrement...

20
Au - delà du portrait Arlette DAVID

Upload: doxuyen

Post on 15-Sep-2018

212 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2

Au-delà duportrait

Arlette DAVID

20.06 583962

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 258 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,07 mm) = 20.06----------------------------------------------------------------------------

Au-delà du portrait

Arlette DAVID

Arlet

te D

AVID

Page 2: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 2

Du même auteur :

« Il boit, elle dérive » (1994) Editions L’Harmattan « Brins d’enfances » (2009) Editions L’àpart

Page 3: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 3

« Par son incomplétude nécessaire, tout portrait pose d’emblée la question de ce qui n’est pas représenté, et invite également à s’interroger sur la focalisation, c’est-à-dire sur le point de vue adopté par celui qui perçoit et décrit. »

Hélène Bernard « Le portrait – Anthologie »

Page 4: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 4

Page 5: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 5

A Bernard

Page 6: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 6

Page 7: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 7

1 « Le vieil homme au fauteuil »

Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé dans son fauteuil rustique : haut dossier, hêtre et paille tressée.

En contraste, à l’arrière plan gauche, sur fond de lambris lazuré, on devine un meuble bas de style design. Sur ce meuble, dans un vase en verre, un bouquet bleu d’hortensias séchés.

A droite, une large fenêtre est ouverte sur la ville. Les clochers des églises, les toits des immeubles sont à peine esquissés, suggérés par une technique de fondus.

Ce portrait à l’huile a été réalisé à la brosse. L’homme ne regarde pas au dehors, il vous

regarde, vous.

Il est assis, tranquille, jambes décroisées, le corps abandonné au fauteuil. A ses pieds, des chaussons de sabots, ce que sa voisine juge stupide :

« Pourquoi porter de tels chaussons quand on vit

Page 8: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 8

au huitième étage ! » Mais le vieil homme n’en a que faire.

Il est vêtu d’une chemise écossaise de laine grattée et d’un pantalon de velours beige qui semblent repassés de frais. Autrefois, pantalon de velours et chemise apprêtée constituaient la tenue du dimanche, le temps de la messe et du « petit blanc » au café du village, le temps des échanges entre agriculteurs : prévisions météorologiques, dernières mises bas, rendements des céréales et contraintes des quotas…

De retour à la ferme, il revêtait le velours élimé et la chemise aux coudes maintes fois rapiécés. A la ferme, le dimanche ne durait pratiquement qu’une matinée.

Désormais le vieil homme est vêtu en dimanche tous les jours de la semaine…

Sur son genou droit, sa main aux veines et aux articulations saillantes, tient un petit objet sombre de nature indéfinie. En regardant la toile de plus près, on pourrait supposer qu’il s’agit d’une de ces anciennes tabatières de poche. Mais rien n’est certain.

Son bras gauche est posé sur l’accoudoir patiné. Sa main, à demi fermée, garde le souvenir du manche de la bêche, en bois lisse, le souvenir du manche de la fourche, irrégulier.

Bien que quelque peu déformées par l’arthrose, ses deux mains étonnamment larges et charnues dégagent une impression de grande puissance.

Au premier plan, à portée de main, une table

Page 9: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 9

basse noire en bois laqué. Sur son plateau : un mazagran, une demi-pomme,

un laguiole en corne usée, une pipe en bruyère, un verre à digestif – comme on n’en utilise plus – et son fond de liquide ambré.

Un rai de soleil dessine un croissant doré sur la tête de la pipe.

Le vieil homme ne regarde pas sa pipe, il vous regarde, vous.

Une lumière se joue, délicatement, du gris de ses yeux attentifs.

Sa tête est légèrement inclinée vers l’avant. La visière de son éternelle casquette à carreaux

porte une ombre douce sur son front. Sa figure est imberbe, sa peau est lisse. Le vernis satiné du tableau restitue si fidèlement sa texture qu’on serait tenté de caresser la toile.

Les rides graves et profondes, depuis le nez jusqu’aux coins de la bouche, modèlent ce visage magnifique.

Le vieil homme est beau.

Il y a quelques années, alors qu’il travaillait encore à la ferme, un de ses petits enfants l’avait mitraillé de son appareil photographique :

debout au pied de la grange, au volant d’un tracteur, un arrière petit fils dans les bras, penché sur son champ de choux, un grattoir à la

main…

Page 10: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 10

Il avait fait un gros plan de son visage. Il en avait tiré un agrandissement sur papier entoilé. Ce portrait, en noir et blanc, avait eu beaucoup de succès. Chaque membre de la famille en avait désiré un exemplaire, et il était si réussi, que des amis inconnus du modèle avaient souhaité en posséder un !

Tous s’exclamaient à la vue du portrait : « comme il est beau ! »

On avait présenté au vieil homme son image : – Tu as vu Grand-Père comme tu es beau ? Il avait longuement examiné la photo, avait hoché

la tête sans un mot, puis brusquement haussant les épaules, il avait simplement observé, un peu triste :

– Je suis vieux.

Vieux… Depuis combien de temps se sentait-il vieux ? Depuis qu’il ne lui était plus venu l’envie de

bousculer sa femme dans le grenier à foin ? Depuis que leur fils aîné avait introduit de

nouveaux savoir-faire dans la ferme ? Depuis le jour où il n’avait plus vendu, lui-même,

les produits de l’exploitation ? Depuis la grande fête de ses 70 ans ? Depuis qu’il ne faisait plus de projets ? Ou depuis tellement plus longtemps, depuis

toujours… depuis cette « Grande Guerre » dont il n’avait jamais voulu parler et qui lui avait volé sa jeunesse ?…

Vieux…

Page 11: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 11

Cela fait combien d’années qu’il est le plus vieux du village ? Combien d’années que quelqu’un l’a appelé Jean ?

Depuis la mort de sa femme, la mort de ceux de sa génération, pour tout un chacun proche ou moins proche, il s’appelle « Grand-Père ».

Lui a-t-on jamais demandé ce que cela représentait pour lui ? Simplement une coutume ? Une familiarité ? Le reflet de son grand âge ?

Sent-il son identité assimilée, réduite, à sa place dans une lignée ? Ou bien perçoit-il la sympathie, l’amitié, la tendresse même, exprimées par cette appellation ?

L’appeler Grand-Père n’est-ce pas une réponse chaleureuse à son attitude naturellement accueillante ? Car aux yeux des autres – je l’ai souvent entendu dire – il respire la bonté, la bonté simple et la tranquillité.

On le lui dirait, il s’en défendrait ! Cette tranquillité, cette bonté simple, sont

pourtant perceptibles jusque sur les photos, à sa façon de regarder l’enfant perché dans ses bras noueux, à sa façon, bien à lui, de regarder sa fille dans un cliché de groupe, à sa façon même, de regarder le photographe qui, à l’occasion, l’interpellait :

– Grand-Père, tu peux lever la tête, s’il te plaît, je te vois mal ?

Et le vieil homme, le geste un instant suspendu, levait les yeux avec un naturel confondant, posait un

Page 12: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 12

regard calme sur l’opérateur, puis reprenait sa besogne comme si de rien n’était.

Sur aucune photo on ne le voit figé, a fortiori prenant la pose… On retrouve son port de tête, ses postures, ses expressions familières… Ses épaules sont un peu voûtées. Ses manches, toujours roulées aux coudes quel que soit le temps, découvrent ses avant-bras solides. Son front est habituellement incliné. Aucun sourire de commande, aucun sourire du tout, quoique parfois, rien qu’une ébauche… Et cependant son visage n’est pas sévère.

Mais il a bien fallu quitter sa ferme. Son grand fauteuil à haut dossier se trouve à présent chez sa fille. Il habite avec elle une tour citadine.

A la surprise de tous, il a accepté qu’un de mes amis, qui en avait tant envie, peigne son portrait. Il l’a accepté tout en notant qu’il ne voyait pas l’intérêt de fixer sur la toile un vieux « sanglieu » – comprenez sanglier – comme lui…

Et il est assis là, avec toujours la même simplicité, le même naturel…

Du portrait photographié au portrait peint, une ride s’est accentuée au niveau des sourcils. Le dos s’est un peu plus voûté. Mais il est toujours beau.

Et puis, il a ce regard, surtout ce regard… Cette lumière intérieure quand il vous regarde, vous.

Il vous regarde avec application, il vous regarde avec bienveillance…

Regard photographié, regard peint, même

Page 13: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 13

authenticité. Mais le regard peint tremble d’une nuance nouvelle… Derrière toute l’attention que le vieil homme vous accorde, affleure un camaïeu de nostalgie.

Serait-ce l’écho d’une confidence qu’il fit hier à celui qui posait la signature finale au portrait ? :

« On ne transplante pas un vieux chêne. »

Page 14: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 14

Page 15: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 15

2 « Justine, la poseuse »

Jamais je n’aurais dû accepter de faire le portrait de Justine !

Mais elle avait tant insisté… L’envie lui en était venue en visitant une

exposition dans laquelle je présentais une série de nus réalisés au pastel sec.

Je ne sais pourquoi j’avais fini par acquiescer. De guerre lasse sans doute.

Une fois mon accord acquis, Justine avait entrepris une seconde bataille. Elle avait son opinion arrêtée quant aux modalités d’exécution du portrait : un nu, grand format, à l’acrylique.

De mon côté, au moment même où j’avais cédé à son insistance, j’avais imaginé : un portait en habit, encre de chine noire à la plume, en 20/40 cm.

Je ne me faisais aucune illusion quant à mes motivations… J’avais toujours exécré les couleurs

Page 16: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 16

criardes dont Justine se revêtait, le traitement à l’encre de chine m’en dispenserait ! Quant au nu, il n’en était tout simplement pas question.

J’apprécie particulièrement le travail du nu. Encore faut-il qu’un certain nombre de critères s’y prêtent. Entre autres critères, il me faut avec mon modèle un minimum d’affinité, voire de complicité. Il m’est arrivé dans le passé d’exécuter un nu d’après un modèle qui me déplaisait, non pour des raisons d’esthétique, mais pour des raisons d’attitude, de contact… Nu sur commande, nu laborieux, je ne suis parvenue à rien de bon.

Ma relation avec Justine est une relation de pur voisinage. Le temps a noué un lien d’habitude entre nous alors que nos personnalités, nos orientations et nos choix nous situent aux antipodes l’une de l’autre ! Je ne trouve pas une conviction, même ténue, sur laquelle nous pourrions nous accorder. Cet état de fait me rendait incapable d’exécuter le nu qu’elle souhaitait.

Par ailleurs, je ne pouvais décemment lui en expliquer le motif. Je dus me rabattre sur d’autres arguments.

La négociation fut âpre. Et, comme dans toute négociation, chacune dut admettre quelques concessions.

Il fut donc convenu que le portrait, au format dit « raisin » (50/65cm), ne serait pas un nu ; qu’il serait réalisé au pastel à l’huile, sorte de compromis entre

Page 17: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 17

l’acrylique et le pastel sec qu’elle avait apprécié à l’exposition.

Il ne serait pas exécuté au trait, mais en à-plat, les bâtons de pastel étant travaillés sur la tranche, avec effet de brossage à la térébenthine.

Le jour et l’heure de la première séance de pose furent choisis en tenant compte d’un passage chez le coiffeur pour que Justine « puisse se faire une beauté ».

Or la première séance c’est aujourd’hui, la première séance c’est maintenant… Et à peine Justine passe-t-elle la porte que je regrette doublement de m’être laissée entraîner dans cette aventure…

Qu’a-t-elle demandé au coiffeur ?!! Lorsqu’elle pénètre dans l’entrée, ses beaux yeux

verts disparaissent complètement sous une crinière platine étonnamment déstructurée. Il m’est quelque peu difficile de dissimuler mon ahurissement. Peu importe, Justine totalement préoccupée d’elle-même ne remarque rien.

Elle tourne sur ses hauts talons à fines lanières vernissées pour me permettre de juger de l’ensemble. Un effluve de Dior envahit la pièce.

Justine est ravie. – As-tu vu ? Il est doué mon coiffeur, n’est-ce

pas ? Heureusement cette question n’attend pas de

réponse, car sa coiffure qui se veut négligemment sophistiquée est, selon moi, bien tristement apprêtée…

Page 18: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 18

Justine est vêtue d’un « léger tailleur chic » de couleur turquoise fluorescente. Sa jupe courte laisse entrevoir des jambes un peu épaisses aux veines fatiguées.

Elle m’a susurré : « Inutile de faire trop réaliste ! De toute façon je dois faire assécher mes varices pendant les vacances, le portrait ne fera qu’anticiper la réalité. »

Elle fait glisser le foulard Hermès qui orne le col de sa veste, découvrant un sautoir, corail et argent façonné. La lourde bague à son annulaire gauche, les deux pendentifs furtivement visibles dans la toison opulente, forment, avec le collier, une très belle parure d’artisanat asiatique.

– Alors, tu ne dis rien ! Qu’en penses-tu ? – Tu t’es mise sur ton 31 ! – Il faut bien ! D’ailleurs comme toujours… Je

considère que c’est une politesse à rendre aux autres. Nous discutons un moment du fond du tableau,

du climat à restituer. Je lui propose de nous installer sur la terrasse. – Les rayons du soleil joueront dans la mouvance

de tes cheveux, et puis, la terrasse offre un choix de poses intéressant : accoudée à la balustrade le regard vers le lac, à demi allongée sur un transat, ou si tu préfères, sous la pergola à l’ombre du chèvrefeuille…

Justine veut plus de choix encore. – Ça pourrait être en intérieur ? – Sans problème.

Page 19: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 19

– Je peux voir ? Justine connait bien la maison pour y être venue

de nombreuses fois. Depuis notre « contrat » elle s’est déjà mentalement projetée dans les pièces de vie.

– Le salon, ce ne serait pas mal, près du piano quart de queue par exemple, ça ferait classe… Oh, et puis non ! Ça serait trop… Par contre près de la bibliothèque… Qu’en penses-tu ?… C’est sérieux aussi… Et puis je ne suis pas inculte !

Après réflexion la décision est prise : en effet la bibliothèque sera le cadre du portrait. Justine s’apprête devant les rayonnages. La main gauche sur une étagère, elle croise les jambes, cambre le buste.

– Ça te va comme ça ? Je voudrais me mettre à mon avantage. Ce n’est pas tous les jours que je me « fais tirer le portrait » !

Je tente d’intervenir en faveur du naturel, même si le naturel sur commande relève de l’injonction paradoxale !

J’ai disposé mon chevalet, sécurisé mon support sur la planche à dessin. Je trie mes couleurs de base, cherche mon fusain, pose l’essence de térébenthine à portée de main.

Ah ! Ne pas oublier la gomme, les cotons tiges, l’estompe.

Je traine un peu… On l’aura compris : je recule le moment de me

lancer. Pendant ce temps, Justine décline le verbe poser

Page 20: Au delà du portrait - static.fnac-static.com · Le vieil homme est assis, de face, légèrement tassé ... haut dossier, hêtre et paille tressée. En contraste, à l’arrière

2 20

de multiples façons. J’aurais dû m’en douter, au quotidien elle cherche la pose en permanence ! « En permanence » ? C’est à peine excessif… Mais ce qui est certain : chaque fois qu’un homme passe dans son périmètre ! Et si elle ne faisait que prendre la pose… Non, il faut qu’elle en rajoute ! Car non seulement son corps prend la pose, son regard prend la pose, mais sa voix prend la pose, son discours prend la pose, son rire même prend la pose…

Avec les femmes il en est tout autrement bien sûr : condescendance, froideur, voire souvent agressivité, jamais d’indifférence en tous cas.

Je me suis plusieurs fois demandé pourquoi j’étais si rarement l’objet de ses piques blessantes ? Pourquoi, tout compte fait, maintenait-elle avec moi un type de relation quasiment neutre, ou même relativement cordial ?

Une de mes amies prétend en connaître la raison : « C’est qu’elle ne peut te considérer comme une rivale, ton activité artistique ne vous classe pas dans la même catégorie… Vous ne chassez pas dans les mêmes eaux !… Si, si !… Je pense que d’une certaine façon tu l’intimides… Dans le fond je crois que c’est une femme fragile, crispante sans doute, mais fragile. Si tu veux mon avis, je la plains. »

Fragile, si on veut, crispante c’est certain ! Et pour le moment c’est fou ce qu’elle m’agace !

La bibliothèque manquant de luminosité, pour le jeu des contrastes j’ai branché des spots et commencé