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UNIVERSITE PIERRE MENDES FRANCE
(GRENOBLE II) FACULTE D’ECONOMIE DE GRENOBLE
MEMOIRE DE MASTER II
ECONOMIE TERRITORIALE ET DEVELOPPEMENT
(CONDUITE DE PROJET DE DEVELOPPEMENT TERRITORIAL)
QUEL RAPPROCHEMENT ENTRE
ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE
ET
ECONOMIE CLASSIQUE
SUR LE TERRITOIRE DE L’ARDECHE VERTE ?
POULAIN Katheleen SEPTEMBRE 2013
Enseignant encadrant : Jean LAPEZE
AVERTISSEMENT
L’Université Pierre Mendes France de Grenoble n’entend donner aucune approbation ni
improbation aux opinions émises dans les mémoires des candidats au Master ; ces opinions
doivent être considérées comme propres à leur auteur.
Le mémoire est un essai d’application des méthodes et outils acquis au cours de la
formation.
Il ne saurait donc être considéré comme un travail achevé auquel l'Université conférerait
un label de qualité qui l'engagerait.
Ce travail est considéré a priori comme un document confidentiel qui ne saurait être diffusé
qu’avec le double accord de son signataire et de l’entreprise concernée.
REMERCIMENTS
Mes remerciements vont en premier lieu à l’ensemble de l’équipe du Pays Ardèche verte
qui m’a accompagné dans ce stage, un grand merci à eux pour leur aide et leur accueil
chaleureux. Je remercie particulièrement mes maîtres de stage, Ophélie JOUVENON et
Claudine MENETRIEUX, qui m’ont permis de réaliser cette expérience et qui m’ont
accordé toute leur confiance dans la réalisation de ma mission.
Expérience particulièrement enrichissante, ce fut une chance unique de pouvoir travailler
sur un sujet tel que celui de l’Economie Sociale et Solidaire. Je remercie toutes les
personnes qui m’ont accordé un peu de leur temps précieux pour me recevoir, qui m’ont
permis de mener à bien mes entretiens et ma mission. Merci à tous de m’avoir fait
découvrir toute la richesse de ces initiatives.
Remerciements également à mon directeur de mémoire, Jean LAPEZE, pour ses conseils
avisés et son aide précieuse dans la réalisation de ce mémoire.
Comment ne pas remercier mes proches pour leur soutien durant la rédaction de ce
mémoire mais aussi au cours de toute ma scolarité.
Il ne me reste plus qu’à remercier tous ceux qui ont participé de près ou de loin à l’écriture
de ce mémoire, merci pour leurs conseils et relectures.
Sommaire
REMERCIMENTS
INTRODUCTION GENERALE ........................................................................................ 1
PARTIE I - ESS et économie classique : qu’ont-elles à échanger ? ................................ 6
Chapitre A - Les frontières de l’ESS .................................................................................. 7
I. A. 1) Une définition complexe .................................................................................... 7
I. A. 2) Ces frontières sont-elles figées ? ...................................................................... 10
Chapitre B - Un apprentissage mutuel ............................................................................. 14
I. B. 1) La professionnalisation des structures de l’ESS ............................................... 14
I. B. 2) Un basculement des valeurs ESS vers l’économie classique ........................... 17
PARTIE II - ESS et économie classique : coopérer au service du territoire ............... 20
Chapitre A - Place de l’ESS au sein de l’économie locale de l’Ardèche verte ................ 21
II. A. 1) Rôle de l’ESS dans le développement territorial ............................................ 21
II. A. 2) L’ESS en Ardèche verte .................................................................................. 22
Chapitre B - Redynamiser l’économie du territoire ........................................................ 25
II. B. 1) Créer un tissu économique dynamique et innovant ........................................ 25
II. B. 2) Palier aux difficultés de l’emploi en Ardèche verte ........................................ 27
Chapitre C - Redimensionner les échanges territoriaux ................................................... 31
II. C. 1) Attirer de nouvelles populations ..................................................................... 31
II. C. 2) Créer du lien ville – campagne ........................................................................ 31
II. C. 3) Développer le tourisme ................................................................................... 34
PARTIE III - Quel rôle l’engagement politique peut-il jouer dans le rapprochement
de ces deux mondes ? ......................................................................................................... 36
Chapitre A - Les liens entre ESS et monde politique ....................................................... 37
III. A. 1) Des valeurs communes .................................................................................. 37
III. A. 2) Quelles relations entretiennent ces deux mondes ? ....................................... 39
Chapitre B - Les outils mobilisables par les élus pour faciliter ce rapprochement .......... 42
III. B. 1) Rôle d’acteur .................................................................................................. 42
III. B. 2) Rôle de facilitateur ......................................................................................... 45
CONCLUSION .................................................................................................................. 50
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................ 52
GLOSSAIRE ...................................................................................................................... 55
LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX ............................................................... 57
ANNEXES .......................................................................................................................... 58
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
1
INTRODUCTION GENERALE
Ce mémoire a été réalisé dans le cadre de la formation de deuxième année de master
Conduite de Projets de Développement Territorial (CPDT) dirigé par Monsieur Jean
LAPEZE, également tuteur universitaire de ce mémoire. Il s’appuie sur la réalisation d’un
stage de fin d’étude réalisé au sein du Syndicat Mixte de l’Ardèche verte sous la tutelle de
Madame Ophélie JOUVENON, chargée de mission gouvernance économique, ainsi que de
Madame Claudine MENETRIEUX, animatrice du Contrat Territorial Emploi Formation
(CTEF) de l’Ardèche verte.
Présentation de la structure d’accueil et de la mission de stage
Créé en 2004, le Syndicat Mixte de l’Ardèche verte est la structure qui porte le
Contrat de Développement Durable Rhône-Alpes (CDDRA) de l’Ardèche verte. Situé à la
pointe nord du département de l’Ardèche, il fédère six communautés de communes du
Nord Ardèche (Cf. Annexe 1 : carte de l’Ardèche verte). Afin d’encourager le
développement de son territoire le Pays Ardèche verte a fléché plusieurs thématiques
d’intervention parmi lesquelles : le tourisme et la culture, l’économie et l’emploi,
l’aménagement du territoire, l’environnement et le développement rural... La mise en
valeur et l’accompagnement des dynamiques actuelles qui s’opèrent autour du secteur de
l’Economie Sociale et Solidaire (ESS) se sont imposés comme des enjeux déterminants sur
le territoire. La mission qui m’a donc été confiée fut de réaliser un plan d’action territorial
en faveur de l’ESS sur le territoire de l’Ardèche verte, en adéquation avec les priorités
d’actions du Pays.
La réalisation d’un « panorama » de l’ESS en Ardèche verte par la Chambre
Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire de Rhône-Alpes (CRESS RA) a constitué la
première étape de ce travail. Cet état des lieux, purement quantitatif, réalisé à partir des
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données SIREN (Système Informatique du Répertoire des Entreprises) de l’INSEE de 2010
a permis de quantifier le poids de ce secteur et de définir sa place dans l’économie du
territoire.
La conduite d’entretiens a permis de compléter ce travail et cela auprès de
nombreux acteurs locaux du territoire et de l’ESS : sociétés coopératives, associations,
techniciens des collectivités territoriales, élus etc. L’objectif étant de réaliser un
recensement des actions menées en faveur de l’ESS, des projets ESS en cours, des
difficultés rencontrées par les structures de l’ESS, de leurs attentes… informations qui
nous ont permis d’alimenter le plan d’actions.
Problématique du mémoire
La spécificité de l’ESS tient en sa distinction avec l’économie « classique ». Longtemps
cantonnée au « monde du militantisme » l’ESS est née de modes de coopération, de valeurs
et de modes de fonctionnements différents des pratiques du monde économique
« classique ». Mise au devant de la scène, l’ESS est aujourd’hui de plus en plus reconnue
pour sa capacité à mobiliser des outils en faveur d’un repositionnement local de
l’économie. Plus résistante face aux effets de la crise, créatrice d’emplois locaux et non
délocalisables, réponse aux besoins sociaux non satisfaits par l’économie classique,
créatrice de cohésion sociale et de solidarité etc. sont autant d’arguments en faveur du
développement des structures de l’ESS sur les territoires.
Aujourd’hui ce secteur doit faire face à de nouveaux enjeux, dont la nécessité d’engager
un changement d’échelle afin d’affirmer et d’amplifier son rôle dans le développement
local. Selon de nombreux observateurs le développement autarcique de l’ESS est un frein à
son évolution et de ce fait, prônent un décloisonnement de l’ESS ainsi qu’un
développement des partenariats avec les structures de l’économie. Ainsi nous pouvons
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nous demander quelles relations existent entre ces deux approches de l’économie que
sont l’ESS et l’économie classique ? Quels seraient les avantages d’un rapprochement
pour ces « deux mondes » mais aussi pour le développement du territoire de
l’Ardèche verte ? Quelles formes peuvent alors prendre ces collaborations ? Nous
aborderons également le rôle de l’engagement politique comme un point essentiel
dans la rencontre entre ces deux secteurs de l’économie.
Pour répondre à ces questions nous nous appuierons sur la démarche qui s’opère
actuellement sur le territoire de l’Ardèche verte. Ce territoire comporte un intérêt tout
particulier puisqu’il est actuellement confronté à de nouveaux enjeux : perte de dynamisme
de l’économie locale, secteur industriel vieillissant, pertes d’emplois importantes et
accroissement du poids de l’ESS. Face à ces problématiques le territoire se doit d’engager
de fortes mutations en s’appuyant sur cette nouvelle source d’initiative que représente
l’ESS. Nous verrons comment, sur le territoire de l’Ardèche verte, ce rapprochement entre
économie classique et ESS peut accompagner ces mutations.
Plan du mémoire
Dans un premier temps (partie I) nous nous demanderons en quoi favoriser l’échange
entre économie classique et ESS peut être un atout pour ces deux secteurs. Tout au long de
cette première partie, il conviendra d’apporter des éléments de définition et de
compréhension sur ce qu’est l’ESS et notamment sur ce qui en fait un secteur si particulier
de l’économie. Cette approche théorique nous permettra de comprendre les éléments qui
en font des secteurs indépendants mais qui peuvent tirer avantages d’échanges
d’expériences et de valeurs.
Dans la seconde partie (partie II) nous nous attacherons à montrer en quoi une
collaboration entre économie classique et ESS peut favoriser le développement du
territoire de l’Ardèche verte. Si les structures de l’ESS sont, par nature, impliquées dans le
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développement local, nous montrerons les impacts que cette coopération peut avoir dans
des domaines aussi divers que l’économie, le social, l’environnement...
Enfin nous verrons dans une dernière partie (partie III) le rôle que peut (et devrait) jouer
le monde politique dans cette démarche. Nous verrons que l’engagement politique est un
facteur clés dans le rapprochement entre ces deux champs de l’économie mais qu’il est
parfois difficile à susciter. Nous expliciterons les outils mobilisables mais aussi les freins
de cette démarche.
Nous illustrerons tout au long de ce développement les différentes formes que peuvent
prendre ces coopérations, les outils déployables pour les encourager et les acteurs
impliqués.
Méthodologie adoptée
Ce travail s’appuie dans un premier temps sur une recherche bibliographique permettant
de poser un cadre théorique sur le questionnement traité. La mise en perspective avec la
démarche qui s’opère actuellement sur le territoire d’action de l’Ardèche verte, a été
possible grâce à la réalisation d’entretiens de terrain. Ces entretiens ont été menés sur un
échantillon d’une trentaine de structures de l’ESS du territoire (Cf. Annexe 1 : Guide
d’entretien). Ceux-ci ont permis de caractériser les besoins, les défis et les attentes de ces
structures et de mettre en lumière la diversité de l’ESS du territoire de l’Ardèche verte.
La première partie de ce mémoire s’appuie donc principalement sur l'analyse des
résultats de ces enquêtes. La seconde partie repose sur un diagnostic territorial, effectué en
collaboration avec l’ensemble des chargés de mission du Pays Ardèche verte. Cette analyse
a permis de mettre en relief les ressources mobilisables du territoire et les enjeux à relever.
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La confrontation de ce diagnostic et des résultats des entretiens a permis de construire
les préconisations développées dans la seconde partie. A noter que les propositions faites
dans cette partie sont directement en lien avec les propositions de pistes d’actions
développées au cours du stage.
Les élus et techniciens du territoire ayant été peu nombreux à accepter une rencontre,
l’analyse de ces entretiens ne constitue pas un résultat représentatif. Ainsi, la dernière
partie de ce mémoire s'engage d’avantage vers une préconisation de bonnes pratiques que
vers le constat d'une réelle dynamique s’opérant sur le territoire.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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PARTIE I ESS et économie classique : qu’ont-elles à échanger ?
Dans un premier temps nous allons donc nous intéresser aux spécificités de l’ESS et
comprendre en quoi elle se différencie de l’économie classique mais aussi quelles sont les
interactions possibles entre ces deux secteurs. Nous mettrons en lumière les atouts de
chacun d’eux pour comprendre ce qu’ils sont en capacité de s’apporter mutuellement.
Plusieurs éléments de définition seront développés afin de nous aider dans cette démarche
et de comprendre en quoi la rencontre entre ces deux mondes peut engager un échange de
savoir-faire bénéfiques à chacun.
Nous commencerons cette première partie par définir l’ESS. Ce cadre théorique nous
amènera à comprendre comment l’ESS se différencie de l’économie classique, quelles en
sont les plus-values et les difficultés. L’objectif du second chapitre étant de montrer en
quoi un apprentissage commun, un échange de valeur, peut être un atout pour leur
développement.
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Chapitre A Les frontières de l’ESS
Proposer une définition unique de l’ESS est particulièrement complexe. En effet tous les
observateurs, comme les acteurs de l’ESS, ne s’accordent pas sur une seule et unique
définition. Nous tenterons donc ici de balayer les différentes réflexions menées autour de
ce concept.
I. A. 1) Une définition complexe
Définition
Définir l’ESS est complexe et nécessite de s’intéresser au ressenti d’appartenance des
acteurs économique. Usuellement l’ESS se défini comme à la croisée des différentes
sphères de l’économie (domestique, lucrative et publique) et par son détachement de
l’économie classique en cela qu’elle regroupe l’ensemble des structures dont la
production vise l’utilité sociale et/ou environnementale et non le simple profit.
L’activité d’une structure de l’ESS se fait donc dans un principe de solidarité en vue de
répondre à un besoin social non satisfait. L’ESS place l’humain et la solidarité au centre de
son projet et non uniquement la création de richesses. Si le terme d’ESS est communément
utilisé aujourd’hui il est, à l’origine, constitué de deux expressions distinctes : l’économie
sociale et l’économie solidaire. C’est pourquoi il existe deux manières de définir l’ESS :
par les statuts qui la compose (Cf. partie I. A. 2.) ou par les différents principes de valeurs
appliqués par ces structures de l’ESS (développés ci-dessous).
Historique
S’il est impossible de dater précisément l’émergence de ces structures dites de l’ESS,
nous pouvons dire, à titre d’exemple, qu’il existait déjà il y a 300 ans une forme de mise en
commun du lait pour la fabrication de meules de fromage dans le Jura. Ce mode
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d’entreprendre qui est aujourd’hui (re)découvert semble émerger des différentes crises et
changements économiques et sociétaux. Dans son ouvrage « l’économie sociale et
solidaire, s’associer pour entreprendre autrement » (2001), Danièle DEMOUSTIER met en
évidence cinq phases de mutations de l’ESS qui correspondent chacune à une mutation du
capitalisme français :
De la Révolution française à 1848, proclamation de la IIe République : face à la
concurrence engendrée par le capitalisme industriel et la répression des coalitions et
groupements populaires, de fortes revendications naissent pour revendiquer « le droit au
travail par le droit à l’association » ;
Lors de la seconde moitié du XIXe siècle : naissance des premiers syndicats,
coopératives et mutuelles pour faire face à l’insécurité sociale, fruit de l’industrialisation ;
Dans la première moitié de XXe siècle : la loi de 1901 encourage la constitution
d’association non professionnelles pour palier aux difficultés de la « vie chère » et de
l’accès au repos ;
Après la libération : les pouvoirs publics accentuent leur soutien aux entreprises
associatives qui ont alors un rôle important dans la croissance socio-économique ;
Depuis les années soixante-dix : la transformation des politiques publiques et « la
financiarisation et la multinationalisation du capitalisme » impactent fortement les
associations.
Nous pouvons donc avancer une première hypothèse qui défini l’ESS comme une
alternative aux différentes crises de l’économie classique. Comme nous le montre Danièle
DEMOUSTIER chaque crise est ponctuée par un développement de nouvelles formes de
structures plus sociales et solidaires. Quelles sont alors les particularités qui font de l’ESS
un secteur économique dit « de réparation » de l’économie capitaliste ?
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Les valeurs de l’ESS
Les structures de l’ESS, bien que très hétérogènes, se rassemblent autour de valeurs et de
principes communs qui excluraient toute structure ne répondant pas entièrement à ces
modes de fonctionnement. Ainsi les structures de l’ESS doivent garantir les principes
suivants :
une gouvernance démocratique qui impose l’élection du dirigeant, la mise en place
d’instances collectives de décision et l’application du principe « une personne = une voix »
quelque soit son apport dans la structure ;
la double qualité des personnes : une même personne peut être bénéficiaire du bien ou
du service proposé et promotrice du projet de la structure;
la primauté de l’objet social sur le capital qui implique de mettre au cœur du projet de la
structure « la personne » et l’utilité sociale et non la recherche de profit et de capitaux ;
la non lucrativité ou la lucrativité limitée (en particulier pour les coopératives) et
l’impartageabilité des réserves : les excédents financiers ne peuvent être appropriés par une
personne unique et doivent être réaffectés au développement de la structure ;
la mixité des ressources, soit une gestion des budgets des structures partagées entre
apports publics, privés et de leur propre production ;
l’indépendance politique ou la gestion autonome et indépendante vis-à-vis des pouvoirs
publics même si la coopération l’ESS et le secteur public n’est pas à exclure ;
la liberté d’adhésion et la possibilité de se retirer à tout moment de la structure.
C’est donc ses modes d’entreprendre, ses valeurs et ses principes d’application qui font de
l’ESS un secteur à part entière de l’économie et non les secteurs d’activité qu’elle occupe.
En effet, si l’ESS est très présent dans des secteurs tels que l’action sociale, l’insertion par
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l’activité ou encore l’éducation, elle tend de plus en plus à s’étendre à de nouveaux
secteurs d’activité.
I. A. 2) Ces frontières sont-elles figées ?
Les statuts de l’ESS
Une autre délimitation des structures de l’ESS est souvent proposée et s’attache aux
statuts juridiques de celles-ci : les structures qui font partie de l’ESS sont les associations,
les mutuelles, les fondations et les coopératives. Il faut noter que les coopératives
peuvent elles-mêmes être de plusieurs types (Cf. tableau 1). Ces différents statuts
permettent de transcrire et de garantir la bonne mise en pratique des principes et des
valeurs précédemment mentionnées, en excluant les structures dont le portage est autre.
Tableau 1 : Les différents types de coopérative
Coopératives d’utilisateurs ou d’usagers :
lorsque les associés sont les utilisateurs des
biens et services produits
Coopératives de consommateurs
Coopératives d’habitation HLM
Copropriétés coopératives
Coopératives scolaires
Coopératives d’entreprises : lorsque les
associés sont des entrepreneurs
Coopératives agricoles
Coopératives artisanales
Coopératives de transporteurs
Coopératives maritimes
Coopératives de commerçants détaillants
Sociétés Coopératives et Participatives :
lorsque les associés sont les salariés
SCOP
Coopératives de crédit : lorsque les
associés sont les clients déposants ou
emprunteurs
Banques populaires
Caisse d’épargne
Crédit agricole
Crédit coopératif
Crédit mutuel
La Société Coopérative d’Intérêt
Collectif : lorsque les associés sont
multiples (usagers, salariés, personnes
physiques, associations, entreprises,
collectivités locales…)
Des coopératives territoriales nécessaires
pour répondre à de nouveaux besoins
sociétaux
Source : CRESS RA
Concernant ces modalités de délimitation de l’ESS les désaccords sont vifs. Les
entretiens menés au cours du stage ont mis en lumière le caractère essentiel de ce point. En
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effet, de nombreuses structures de l’ESS déclarent se sentir comparables à des entreprises
sous forme « classique » (SA, SARL…) socialement ou écologiquement responsables.
Dans ce cas, ils ne s’opposent pas au fait que de petites entreprises (TPE, PME ou PMI) se
proclament appartenir de l’ESS si la production est locale, si la structure est active dans le
développement de son territoire ou encore si elle met en pratique les principes et valeurs de
l’ESS.
Néanmoins pour beaucoup d’acteurs militants en faveur de l’ESS, il convient aussi
d’être prudent quand aux structures qui se proclament de l’ESS. En effet, nous pouvons
nous demander si des structures, qui appartiennent officiellement à l’ESS via leur statut,
mais qui atteignent des tailles importantes, sont encore en mesure de mettre en place les
principes de l’ESS, notamment celui de la démocratie. Mais aussi si ces structures, qui
rayonnent parfois nationalement ou internationalement, sont encore en capacité de
s’intégrer localement.
Les importantes SCOP (Sociétés Coopératives et Participatives) sont le plus souvent
« montrées du doigt ». Les SCOP sont des sociétés commerciales, elles vivent et se
développent dans le secteur concurrentiel classique. Leur principale originalité : les salariés
sont les actionnaires majoritaires de leur entreprise et le dirigeant de celle-ci est élu par les
salariés-associés. Pour de nombreux acteurs les SCOP ne répondent pas à des besoins
sociaux et développent des activités concurrentielles à l’image de l’économie
classique. Néanmoins selon Danièle DEMOUSTIER « l’entreprise peut ne pas être
lucrative même si elle est marchande » dans la mesure où les excédents réalisés sont
entièrement réinjectés dans la société.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Enfin certaines structures, et notamment les associations, ne se sentent pas appartenir au
monde de l’ESS, soit parce qu’elles ne se considèrent en aucun cas intégrées dans
l’économie (et donc ont une certaine méconnaissance de ce qu’est l’ESS), soit parce
qu’elles ne se sentent pas proches des autres familles de structures inclues dans cette notion
(à l’image d’une certaine opposition entre associations et sociétés coopératives). Tous ces
éléments montrent bien la difficulté de proposer des frontières précises au secteur de l’ESS
et notamment de bien différencier ESS et monde économique classique. C’est pourquoi
cette problématique a été prise en compte dans le projet de loi présenté par Benoît
HAMON, ministre délégué à l’Economie sociale et solidaire et à la Consommation, en
juillet 2013.
Le projet de loi : une définition inclusive
Malgré leur conformité avec « la charte de l’économie sociale et solidaire », publiées en
1980 par le Comité National de Liaison des Activités Mutualistes, Coopératives et
Associatives (CNLAMCA), les différentes définitions que nous avons développées ci-
dessus ne font pas l’unanimité. Nombreuses sont les structures qui ne se considèrent pas de
l’ESS ou qui n’approuvent pas de voir certaines autres s’en revendiquer. Le projet de loi
sur l’ESS s’est attaché à apporter des éléments de réponse à ces attentes : il propose une
définition claire de ce qu’est l’ESS et donc des structures qui seront ou non inclues dans ce
secteur.
Si la définition proposée conforte l’appartenance au champ de l’ESS des entreprises
dont les statuts sont traditionnellement inclus (coopératives, mutuelles, associations et
fondations) elle propose d’y inclure de nouvelles formes d’entreprises. Ainsi certaines
entreprises commerciales pourront alors faire partie de l’ESS à condition de respecter
l’ensemble des principes que sont : une gouvernance démocratique, la recherche d’un but
d’utilité sociale, une orientation des excédents vers la poursuite pérenne de l’activité de
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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l’entreprise ou encore la limitation des possibilités de spéculer sur le capital et les parts
sociales1.
Cette mesure peut être interprétée comme le point de départ d’une ouverture de l’ESS
au monde de l’économie classique. L’ouverture du monde de l’ESS aux entreprises
commerciales dites « classiques » engage un premier pas dans un rapprochement possible
entre économie classique et ESS.
Nous voyons bien que les frontières entre ESS et monde économique classique ne sont
pas toujours évidentes. Nous pouvons en conclure que certains types de structures vont
avoir plus d’intérêt ou de facilité à se rapprocher du secteur classique et vice-versa,
puisqu’elles partagent plus ou moins certaines caractéristiques. Nous avons vu les
particularités du secteur de l’ESS et pouvons ainsi nous demander quelles sont les
compétences que ces deux mondes économiques peuvent échanger ?
1 « Projet de loi économie sociale et solidaire, entreprendre autrement pour créer des emplois dans nos
territoire » 2013
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Chapitre B Un apprentissage mutuel
Grace à leurs particularités, les structures de l’ESS disposent d’acquis différents de
l’économie classique. Une coopération entre économie classique et ESS peut-elle engager
un échange de connaissances et de « culture » ? Quels seraient les avantages pour chacun
de ces deux secteurs à coopérer ?
I. B. 1) La professionnalisation des structures de l’ESS
De nouvelles contraintes pour l’ESS
L’argument est souvent avancé : les entreprises de l’ESS sont plus résistantes aux
effets de la crise que les entreprises de l’économie classique car elles ont continué à créer
des emplois. En Ardèche, la croissance des emplois de l’ESS entre 2005 et 2009 est
supérieure à celle du secteur privé lucratif (+10,5 % contre +5,9%). En revanche les
établissements de l’ESS n’ont progressé que de 7,2%, contre 15,9% pour le secteur de
l’économie classique, principalement en raison d’un phénomène de fusion d’établissements
existants. Pour cette même période, le nombre total d’ETP dans l’ESS a augmenté de
12,5% contre 4,1% pour le secteur lucratif privé. En Ardèche verte, les effectifs de l’ESS
dans l’économie locale sont passés de 14,3% en 2005 à 15,4% en 2009.2. Néanmoins ces
structures doivent faire face à de nouvelles difficultés que nous allons voir ci-dessous.
2 Panorama de l’ESS en Ardèche de 2005 à 2009, réalisé par le CRESS RA en 2012
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Figure 1 : Evolution des effectifs salariés en Ardèche
Source : Panorama de l’ESS en Ardèche de 2005 à 2009 (2010)
Face au contexte actuel de baisses des ressources publiques, les entreprises de l’ESS
doivent faire face une baisse des subventions. Ainsi, de nombreuses associations ont vu la
part de leurs financements publics diminuer fortement. Les rigueurs budgétaires imposées
aux collectivités territoriales fragilisent donc un grand nombre de structures de l’ESS qui
sont de plus en plus confrontées à des difficultés financières.
En parallèle, l’ESS doit faire face à la montée de la concurrence sur les marchés et
particulièrement sur les marchés publics. Les structures de l’ESS sont particulièrement
mises à mal par cette concurrence accrue. En effet, les commanditaires sont de plus en plus
attentifs à la professionnalisation et la rentabilité des entreprises sous-traitantes. La perte
d’un marché public tend à fragiliser fortement certaines structures de l’ESS. Dans cette
recherche de rentabilité la petite taille des ces entreprises constitue un handicap réel (en
Ardèche verte une entreprise de l’ESS emploie en moyenne neuf salariés par
établissements). Ces arguments sont autant de points qui incitent les structures de l’ESS à
engager de nouveaux partenariats avec les structures de l’économie classique dans
l’objectif d’acquérir de nouvelles compétences en matière de professionnalisation et de
concurrence.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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S’appuyer sur l’économie classique pour se professionnaliser
Pour faire face à la montée de la concurrence ou à la baisse des subventions les structures
de l’ESS doivent se forger une plus grande « culture du profit ». Elles doivent en
premiers lieux investir de nouveaux marchés dynamiques, innovants et concurrentiels.
Cependant ces structures sont majoritairement constituées de bénévoles ou de salariés
parfois peu qualifiés. Les structures de l’ESS peinent alors à se doter d’une gestion
efficace, ce qui est particulièrement visible lorsqu’elles doivent faire face à une hausse
importante de leur activité. Pour pallier à cela ces structures doivent engager des
formations (des bénévoles ou des salariés), un accompagnement par des consultants ou des
DLA (Dispositifs Locaux d’Accompagnement) afin de se familiariser aves les outils de
l’économie classique. L’échange d’expérience, le partage de connaissances, l’intégration
des structures de l’ESS dans des filières dynamiques et compétitives semblent donc
indispensables pour que l’ESS amorce ces mutations.
Face à ce constat les questions idéologiques qui se posent sont nombreuses notamment
quand à la professionnalisation du secteur associatif. En effet, cela implique de rompre
avec la vision d’un monde associatif comme totalement détaché de la sphère économique
lucrative. C’est pourquoi selon Matthieu Hély « il convient de s’affranchir d’un poncif qui
a la peau dure et selon lequel, en se rationalisant, les associations « perdraient leur
âme »3. La crainte de voir l’ESS s’investir au sein d’activités lucratives et moins solidaires
est particulièrement présente.
3 HELY Matthieu (2008), « L’économie sociale et solidaire n’existe pas », La vie des idées, 11 février 2008
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I. B. 2) Un basculement des valeurs ESS vers l’économie classique
Participation et mobilisation
Comme nous avons pu le voir un des principes fondateurs de l’ESS est l’application d’une
gouvernance démocratique. Les membres de ces entreprises doivent donc appliquer le
principe « une personne = une voix » dans leurs processus de décision. Tous les salariés et
bénévoles peuvent donc, de manière égalitaire, s’exprimer et participer activement aux
décisions de pilotage et d’évolution de la structure. Pour de nombreux observateurs c’est la
raison majeure qui fait des structures de l’ESS des entreprises plus résistantes
économiquement.
En effet, il semble que le principe démocratique soit source de mobilisation pour les
salariés des entreprises l’ESS : plus impliqués dans les décisions, plus acteurs de leur
activité, les salariés se mobilisent d’avantage pour la bonne santé de leur entreprise. Loin
des systèmes hiérarchiques et des logiques de division du travail du monde économique
capitalistique, la concertation prônée au sein de ces structures semble également être une
source d’innovation et d’« entreprenariat collectif ». La mutualisation des compétences est
plus propice à l’échange et à la confiance et semble créatrice d’une « intelligence
collective ».
De plus, la concertation dans une entreprise de l’ESS implique également les
bénéficiaires, c’est ce que nous avons vu dans le principe de « double qualité des
personnes » cité ci-dessus. Le fait que les bénéficiaires soient aussi des acteurs de
l’activité permet une meilleure adéquation de l’offre et de la demande et donc de
répondre aux nouveaux besoins qui émergent chaque jours sur le territoire : argument
développé par Danièle DEMOUSTIER dans son ouvrage « l’économie sociale et solidaire,
s’associer pour entreprendre autrement ».
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Coopération et mutualisation
Enfin les processus de coopération et de mutualisation largement appliqués dans le monde
de l’ESS peuvent être utilisés pour palier à de nombreuses difficultés de l’économie
classique : recherche d’investissements, réalisation d’économies d’échelle... Les formes les
plus courantes sont la mutualisation de matériel, de personnel, de locaux ou de services qui
permettent de faire baisser les coûts fixes. De plus, nous l’avons vu ci-dessus, la
mutualisation de compétences permet d’augmenter le « capital connaissance ».
Une meilleur acceptation sociale
En Ardèche verte, comme en France, la préservation de l’environnement et le
développement durable sont des enjeux ayant de plus en plus de poids. Les attentes et les
besoins de la population ont évolué face à la crise environnementale et les modes de
consommations se conscientisent. La demande est de plus en plus forte en matière de
respect de normes sociales ou environnementales, de circuits courts, de consommation de
produits éthiques et biologiques etc. Si l’ESS est largement implantée dans ces domaines
innovants, ce n’est pas toujours le cas de l’économie classique. Pour s’adapter, les
entreprises de l’économie classique se doivent de modifier leurs modes de production et
d’intégrer dans leur offre de produits ou de service des garanties sociales,
environnementales ou éthiques.
Néanmoins il est légitime de se demander si l’adoption de principes issus de l’ESS par
les structures de l’économie classique ne peut pas donner lieu à des dérives d’appropriation
de leur part ? La question de la banalisation du terme « économie sociale et solidaire » est
une crainte partagée par un grand nombre d’acteurs de ce secteur. Par exemple l’adoption
du principe de primauté de l’objet sociale ne peut-il pas devenir un argument de vente pour
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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des sociétés en mal d’acceptation et ainsi devenir un moyen d’embellir leur image auprès
des consommateurs ? Ainsi, la création de fondations d’entreprise ou de partenariats avec
des associations dans un but purement marketing sont particulièrement remis en cause. Il
en va de même pour la création de structures de mutualisation : l’objectif ne doit pas se
cantonner à faire baisser les coûts mais doit s’impliquer dans une réelle dynamique de
coopération, d’entraide et de solidarité entre les structures.
Que ce soit pour faire de l’ESS un secteur plus solide ou pour rendre les entreprises de
l’économie classique plus innovantes un apprentissage mutuel est nécessaire. Ces
« glissements » ne peuvent se faire sans un réel échange d’expériences et de savoir-faire.
La rencontre entre ces secteurs n’est pas spontanée et doit donc être provoquée : autour
d’un marché commun, via un acteur extérieur etc.
Outre cet apprentissage commun en faveur du développement de ces secteurs nous
allons voir, dans cette seconde partie, qu’une coopération entre ESS et économie classique
peut aussi être bénéfique pour le territoire de l’Ardèche verte.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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PARTIE II
ESS et économie classique : coopérer au service du territoire
Depuis de nombreuses années, le territoire de l’Ardèche verte doit faire face à des
difficultés économiques importantes. Les effets des crises successives ont provoqué une
forte baisse de l’activité industrielle, notamment dans la filière automobile qui est
prédominante sur le territoire. L’industrie reste la première activité du territoire mais sa
dépendance aux mutations externes rend le territoire particulièrement fragile et dépendant.
C’est pourquoi l’Ardèche verte se doit d’œuvrer pour une reconversion économique
favorisant la diversité de ses activités. Plusieurs mutations sont en marche : le
développement du tourisme, le déploiement d’une agriculture respectueuse de
l’environnement, la commercialisation en circuit court, la valorisation de la filière bois et
d’un espace naturel caractéristique etc. Face à ce constat nous pouvons nous demander
comment une meilleure intégration de l’ESS au sein de l’économie locale peut apporter
une réponse efficace à ces enjeux de développement.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Chapitre A Place de l’ESS au sein de l’économie locale de l’Ardèche verte
Ce premier chapitre a pour objectif de comprendre comment l’ESS s’intègre dans le
territoire de l’Ardèche verte. Nous présenterons dans une première partie théorique
comment l’ESS est, par essence, impliquée localement. Puis dans une seconde partie nous
tenterons de caractériser son poids dans l’économie locale du Pays Ardèche verte.
II. A. 1) Rôle de l’ESS dans le développement territorial
Cette partie théorique a pour objectif de décrire les processus qui font de l’ESS un
acteur impliqué dans le développement local. Ceci engage des mécanismes nombreux et
complexes dont nous proposerons ici qu’une présentation succincte.
En premier lieu, l’ESS crée des emplois et de l’activité non délocalisables, car
directement en lien avec la demande et les besoins locaux. L’ESS permet donc de
développer le territoire de manière endogène, c'est-à-dire par l’utilisation de ressources
locales et non par un développement qui viserait à attirer des entreprises extérieures en
tentant de rendre le territoire attractif pour celles-ci. Ce secteur est ainsi moins exposé aux
fluctuations du marché, moins intégré dans la concurrence internationale et donc créatrice
d’activité plus durable et moins fragile.
L’ESS permet de répondre à des besoins de la population locale non satisfaits par
l’économie classique. Elle vise donc un pan du développement : celui du bien-être humain.
C’est ce que nous avons constaté au travers des valeurs de l’ESS : ce secteur place
l’humain au cœur de son projet et non la recherche de capitaux.
Enfin l’ESS crée de la solidarité. Cette solidarité peut s’exprimer au sein même des
structures de l’ESS, en interne, mais aussi en externe, via de la coopération et de la
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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mutualisation avec d’autres structures du territoire. Ces outils collaboratifs utilisés par
l’ESS permettent également de mettre en réseaux les entreprises, les structures publiques,
la population etc., l’ESS crée donc une solidarité entre l’ensemble des acteurs de son
territoire.
II. A. 2) L’ESS en Ardèche verte
Nous allons ici quantifier la place de l’ESS dans l’ensemble de l’économie en Ardèche
verte, l’intégralité des chiffres présentés ci-dessous sont issus d’un panorama de l’ESS
dans le Pays de l’Ardèche verte réalisé par la CRESS RA grâce aux données INSEE CLAP
2010.
Comparaison supra et infra départementale
En France le champ de l’ESS représente 10,3% des effectifs et 9,5% des établissements.
Pour la région Rhône-Alpes ces pourcentages atteignent respectivement 10,7% et 9,9%. Le
département de l’Ardèche est encore au dessus des moyennes régionales puisque le poids
de l’ESS atteint 15,5% des effectifs et 12,8% des établissements. En Ardèche verte l’ESS
occupe une place relativement importante puisque 14,4% des effectifs salariales et 14%
des établissements sont issus de l’ESS. De plus, en Ardèche verte 42 salariés sont issus de
l’ESS pour 1 000 habitants, ce taux est le même pour la moyenne départementale alors que
ce chiffre est de 39 pour la région et de 36 pour le pays.
Néanmoins au niveau régional c’est dans la vallée de la Drôme que l’ESS pèse le plus
dans l’économie, avec 16% des effectifs et 13,5% des établissements, juste après le Pays
de l’Ardèche Méridionale, avec 16,9% des effectifs et 12,4% des établissements. En
revanche, Rhône Pluriel ne dénombre que 9,7% de ses effectifs dans le domaine de l’ESS
et 8% de ses établissements. Enfin la Drôme des collines, elle, compte 13% de ses effectifs
salarial dans le champ de l’ESS et 9,4% de ses établissements.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Caractéristiques de l’ESS en Ardèche verte
En Ardèche verte, nous dénombrons 386 établissements de l’ESS répartis ainsi : 332 pour
les associations, 41 pour les coopératives et 13 pour les mutuelles. Cela représente 2 812
ETP (Equivalent Temps Plein) pour un effectif de 3 419 personnes dont 90% travaillent
dans une association, 7% dans une coopérative et 3% dans une mutuelle. C’est la
Communauté de communes du Hauts Vivarais qui est la plus concernée par ce secteur de
l’économie puisqu’il représente 21% des effectifs, 16% des établissements et 20% des
ETP. A l’inverse, dans la communauté de communes de Vivarhône, l’ESS n’occupe que
8% des effectifs, 7% des établissements et 6,7% du nombre d’ETP.
Figure 2 : Carte du poids de l'ESS en Ardèche verte.
Source : INSEE Clap 2010
La répartition des établissements par secteur d’activités se décompose ainsi : 20% dans
l’action sociale, 17% dans l’éducation, 14 dans les sports et loisirs, 9% dans la culture etc.
Les effectifs eux se répartissent ainsi : 44% dans l’action sociale, 29% dans l’éducation,
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9% dans la santé etc. Dans le secteur des Arts et spectacles 97% des établissements et 92%
des effectifs appartiennent à l’ESS, suit le secteur des sports et loisirs (84% des
établissements et 65% des effectifs), le secteur de l’action sociale (79% des établissements
et 68% des effectifs) etc. A l’inverse dans le secteur de la construction seuls 0,3% des
établissements et 0,2% des effectifs appartiennent à l’ESS.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Chapitre B Redynamiser l’économie du territoire
2008 a marqué le début du repli de l’activité économique sur le territoire de l’Ardèche
verte : l’industrie textile a connue plusieurs fermetures définitives, l’industrie automobile a
fortement baissé son activité, les transports routiers ont du faire face à une concurrence
internationale toujours plus forte, les carnets de commandes en matière de construction et
d’immobilier ont décliné etc. Les défis économique et sociaux qui en découlent sont
multiples et nous alors voir comment la coopération entre ESS et économie classique peut
engager des réponses à ces différents défis.
II. B. 1) Créer un tissu économique dynamique et innovant
Créer des complémentarités
En matière de création de nouvelles activités les enjeux liés à la collaboration entre ESS
et économie classique sont doubles. En premier lieu, cette coopération permet aux
structures de l’ESS d’intégrer des filières dynamiques en vue de leur assurer une activité
compétitive. En parallèle elle doit permettre aux entreprises « classiques » de s’appuyer sur
le caractère innovant des activités portées par l’ESS et ainsi d’intégrer de nouvelles niches
d’activités. Certains secteurs sont propices à cette collaboration, nous pouvons citer
l’exemple des retraitements des déchets ou de leur réemploiement, secteur dans lequel les
structures de l’ESS se positionnent fortement. Particulièrement innovantes en la matière,
les structures ESS portent dans ces projets de réels enjeux sociétaux que l’économie
classique se doit d’intégrer.
L’écologie industrielle peut constituer un cadre adéquate à cette collaboration, celle-ci
vise à « transformer les déchets des uns en matières premières ou sources d’énergie pour
les autres ». Ce type de projet « repose sur la recherche de la synergie entre deux ou
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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plusieurs acteurs économiques qui se rapprochent pour mettre en place des
coopérations »4. Les structures de l’ESS semblent ici avoir toute leur légitimité car ces
notions partagent des principes de réciprocité locale, de solidarité ou encore de confiance.
L’intégration de structures de l’ESS dans les clubs d’entrepreneurs ou dans des filières sont
des moyens de mettre en place ces collaborations.
La filière automobile est la plus dynamique sur le territoire de l’Ardèche verte : à la fin
de l’année 2008 elle concernait plus de 3 100 personnes. Organisés autour de l’association
départementale VILESTA (Véhicules Industriels et de Loisirs, d’Equipements et de Sous-
Traitance de l’Ardèche) la majorité des entrepreneurs ont su créer leur réseaux. Une
meilleure prise en compte des enjeux environnementaux pourrait alors bénéficier à un
travail commun avec des structures de l’ESS.
Les PTCE, nouvel outil au service de la coopération
Les Pôles Territoriaux de Coopération Economique sont des « regroupements, sur un
territoire donné, d’initiatives, d’entreprises et de réseaux de l’économie sociale et
solidaire associé à des PME socialement responsables, des collectivités locales, des
centres de recherche et organismes de formation, qui mettent en œuvre une stratégie
commune et continue de coopération et de mutualisation au service de projets
économiques innovants de développement local durable »5. Depuis 2009 le labo de l’ESS
(laboratoire d’idées dédié à la connaissance et la reconnaissance de l’ESS) a engagé un
travail de caractérisation et de promotion des PTCE. En 2011 et 2012 une vingtaine
d’initiatives ont été retenues comme « pôles témoins » et en juillet 2013 les premiers
appels à projets ont été lancés pour soutenir le développement de projets PTCE grâce à des
aides de l’Etat.
4 Publication ETD « Ecologie industrielle et territoriale : les collectivités actrices de la transition énergétique
et écologique ». Juin 2013 5 Le labo de l’ESS (http://www.lelabo-ess.org)
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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En Ardèche verte la SMAC07 (Scène de Musique Actuelle de l’Ardèche) a été labélisée
PTCE. Elle regroupe trois associations en Nord et Sud Ardèche, investies dans un projet de
création d’un schéma concerté de développement des musiques actuelles en Ardèche. Bien
qu’il ne soit composé que d’associations ce pôle territorial illustre bien comment une
solidarité peut s’installer entre différentes structures aux complémentarités certaines, et
cela autour d’un projet de territoire commun. L’intégration de structures de l’économie
classique pourrait renforcer et compléter cette dynamique territoriale. Ce nouvel outil tend
à se diffuser pour devenir de plus en plus influent sur les territoires locaux.
II. B. 2) Palier aux difficultés de l’emploi en Ardèche verte
Face à la déprise économique locale, la thématique de l’emploi est devenue
particulièrement importante pour le territoire de l’Ardèche verte. Le taux de chômage est
passé de 7,9% en 2008, à 9,8% en 2009, pour atteindre 10,3% en 2013. Le chômage de
longue durée touche actuellement près de 43% des demandeurs d’emplois. En Région
Rhône-Alpes, les départements de la Drôme et de l’Ardèche sont les plus touchés par le
chômage avec respectivement des taux de 11,5% et 11,3% en 20136.
L’insertion par l’activité économique
Les Structures de l’Insertion par l’Activité Economique (SIAE), les organismes de
formation, les entreprises adaptées… sont autant de structures qui tentent de répondre à un
besoin social : celui de faciliter l’intégration dans le monde du travail de personnes en
difficulté (jeunes sans qualifications, chômeurs de longue durée, personnes
handicapées…). Ces structures sont largement créatrices d’emplois faiblement qualifiés et
permettent de répondre aux problématiques du chômage précaire et de longue durée. Les
6 Mireille DOMENGE-VIGNERON pour l’INSEE Rhône-Alpes, « Synthèse locale Ardèche verte », 2011.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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chantiers d’insertion et la sous-traitance de personnel s’organisent pour répondre aux
besoins des entreprises. La mise en place de partenariats, formels ou informels, permet aux
entreprises de l’insertion de pouvoir s’assurer des marchés importants durablement. La
demande peut également émaner des entreprises de l’économie classique elles-mêmes car
certains secteurs rencontrent des difficultés structurelles de recrutement, certains territoires
peu attractifs manquent de main d’œuvre etc. Ces entreprises peuvent alors constituer un
Groupement d’Employeurs pour l’Insertion et la Qualification (GEIQ) qui gère
l’embauche, la qualification, le suivi des personnes ayant des difficultés liées à l’insertion
économique.
Sur le territoire de l’Ardèche verte on dénombre plusieurs structures d’insertion, qui
couvrent l’ensemble du territoire. Néanmoins les entretiens menés auprès de ces structures
ont montré une certaine fragilité de ces entreprises (perte des marchés publics, baisses des
subventions, concurrence accrue entre structures…), mais aussi un manque de coordination
et de lisibilité de l’offre. Nous le verrons dans la troisième partie : les collectivités
territoriales ont un rôle important à jouer en faveur de ces structures et de leur coopération
avec les entreprises de l’économie classique. (Cf. Annexe 3 : Pistes d’action en faveur de
l’ESS sur le territoire Ardèche verte).
Exemple des saisonniers agricoles
Ce territoire rural est occupé à 40% par des terres agricoles, les emplois saisonniers
agricoles constituent donc une main d’œuvre indispensable. Néanmoins ces travailleurs
doivent faire face à de nombreuses difficultés : mobilités faibles, manques de logement,
manques d’aire d’accueil pour les saisonniers nomades, offres de missions qui varient
selon les conditions météorologiques… La prise en compte de ces problématiques par les
employeurs, comme par les pouvoirs publics, est indispensable pour engager des moyens et
actions pour palier à ces attentes. L’ESS constitue une nouvelle fois un gisement d’outils
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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qui ne peuvent être occultés : groupement d’employeurs, coopération avec une structure de
l’IAE (Insertion par l’Activité Economique), mise à disposition de logements aidés par la
ville etc. (Cf. Annexe 3 : Pistes d’action en faveur de l’ESS sur le territoire Ardèche verte)
Les Coopératives d’Activité et d’Emplois
Face au contexte économique actuel de l’Ardèche verte, la création d’activité est en
constante évolution : en 2011 seuls 590 établissements ont vu le jour, les secteurs les plus
dynamiques étant le commerce, les transports et les services avec 403 entreprises créées
dans cette même année. En effet, les travailleurs se tournent de plus en plus vers la création
de leur propre activité pour créer leur propre emploi et c’est pourquoi les TPE (Très Petites
Entreprises) sont de plus en plus nombreuses. Pour faire face aux difficultés des
entrepreneurs les CAE (Coopératives d’Activité et d’Emplois) apportent des solutions
sécurisantes et adaptées pour tester et développer une activité indépendante. Les porteurs
de projets peuvent ainsi bénéficier de formations, d’un accompagnement et surtout d’un
statut de salarié. La mutualisation des tâches administratives, comptables ou sociales
permet à ces entrepreneurs – salariés de bénéficier d’un cadre juridique sécurisé.
Le réseau ITESS (réseau d’Initiatives Territoriales de l’Economie Sociale et Solidaire)
qui se déploie sur l’ensemble du territoire de l’Ardèche verte est constitué de trois CAE
regroupées autour d’une démarche territoriale. La coopérative Natura SCOP est spécialisée
dans les métiers de l’environnement, Eclectic dans les métiers des TIC (Technologies de
l’Information des Communications) enfin Pollen SCOP est une coopérative généraliste.
Cette large couverture du territoire représente une opportunité certaine pour ses habitants.
Les CAE spécialisées permettent une réelle mise en réseaux des acteurs de la même filière
Cette solution coopérative peut donc être utilisée pour accompagner des personnes à
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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développer leur activité en toute sécurité mais aussi pour accompagner des professionnels
en difficulté.
Ainsi en Ardèche verte la filière bois, une activité particulièrement développée sur le
territoire, emploie de nombreux Entrepreneurs de Travaux Forestiers (ETF). Ces
travailleurs exercent généralement leur activité de manière isolée ce qui les contraints à
enchaîner de petits chantiers parfois à perte. Ils manquent également de formation sur la
sécurité ou sur la gestion de leur activité. Les coopératives permettent de palier à ses
difficultés par une offre de formation, un travail en groupement, un échange d’expérience
etc. Néanmoins si ces coopératives représentent pour les travailleurs indépendants et isolés
un moyen de coopération efficace elles sont malheureusement très peu connues et encore
trop peu nombreuses.
La coopération entre secteur privé lucratif et ESS permet donc d’apporter des solutions
aux défis du territoire et notamment en matière d’emplois. Mais nous allons voir que ce
secteur peut aussi avoir un réel impact sur l’ensemble de la dynamique territoriale.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
31
Chapitre C Redimensionner les échanges territoriaux
Dans ce dernier chapitre, nous allons voir comment cette coopération entre ESS et
économie classique peu rendre le territoire plus attractif, lui permettre de capter de
nouveaux revenus. Nous tenterons de comprendre comment ESS et économie classique
peuvent s’associer pour devenir un outil au service de la différenciation territoriale.
II. C. 1) Attirer de nouvelles populations
Comme le présente Danièle DEMOUSTIER un autre enjeu se détache dans cette
démarche : l’attraction de nouvelles populations en faveur d’une économie résidentielle.
En effet l’ESS permet de répondre aux besoins de services de proximité ce qui constitue
une demande importante de la part des populations urbaines migrant vers le milieu rural. Si
les structures de l’ESS peuvent répondre aux besoins basiques telles que l’enseignement,
l’école, la santé, l’alimentation ou les communications, elles peuvent proposer des services
plus innovants, au service des entreprises privées, tels que : des moyens de transports
mutualisés par des entreprises, l’installation de centres de télétravail mutualisés… Pour les
entreprises classiques cette coopération constitue un moyen d’attirer une nouvelle main-
d’œuvre, en répondant à leur demande de services et de formation. Dans cette optique un
travail commun, notamment par la communication, entre structures ESS et entreprises
classiques est indispensable pour répondre efficacement à ces besoins émergeants.
Attirer de nouvelles populations en milieu rural peut s’avérer être un enjeu fort pour
engager une « repopulation » des campagnes comme nous allons le voir ci-dessous.
II. C. 2) Créer du lien ville – campagne
L’Ardèche verte est un territoire rural et peu dense (en moyenne 87 habitants au
kilomètre carré contre 138 habitants en Rhône Alpes), il est donc concerné par toutes les
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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thématiques qui en découlent : difficultés d’accès aux différents services, difficultés liées à
la mobilité (transport en commun peut développés, mobilité réduite pour les personnes en
difficulté sociale…), population vieillissante, départ des populations jeunes, peu de
renouvellement de la population etc. Ces problèmes touchent particulièrement la zone
ouest du territoire, qui se caractérise par une ruralité plus importante, un tissu urbain très
peu dense, un manque criant de transports collectifs, des difficultés économiques plus
fortes, une activité économique tournée vers l’agriculture… La partie est du territoire de
l’Ardèche verte, qui longe la vallée du Rhône, est un espace bien plus dynamique
économiquement, plus urbanisé, doté de zones d’activité... (Cf. figure 3 ci-dessous). Le
territoire est donc confronté à un enjeu fort lié à la conservation du lien « ville campagne ».
Traditionnellement l’ESS est d’avantage implantée en milieu rural et moins en milieu
urbain. Les grandes industries et grandes sociétés sont donc mieux implantées dans la
Figure 3 : L'Ardèche verte : un territoire hétérogène
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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vallée du Rhône alors que les structures de l’ESS sont plus présentes dans la partie ouest
du territoire. La problématique du désenclavement des campagnes de l’Ardèche verte peut
donc être reliée à celle du rapprochement entre structures de l’ESS et de l’économie
classique. Apprendre à se connaitre, se rencontrer pour engager des partenariats entre
structures qui ne se connaissent pas, peut aussi influencer et renforcer ce lien entre ville et
campagne.
Dans un premier temps cette coopération permettrait d’apporter des réponses plus
efficaces aux difficultés d’accès aux services par la population. En effet, face à
l’augmentation de la demande les structures de l’ESS ne sont pas toujours en capacité d’y
répondre. Par exemple, face au vieillissement de la population, l’aide à domicile est une
thématique de plus en plus importante sur le territoire. Ainsi, la SEMAD (Service
d’Entraide et de Maintien à Domicile) d’Annonay et l’ADMR (Aide à Domicile en Milieu
Rural) sont les structures de l’ESS les plus employeuses sur le territoire (plus de 100
personnes chacune). Mais face à l’augmentation de la demande, ces structures rencontrent
de plus en plus de difficultés à remplir leurs objectifs.
Cette coopération peut donc permettre de proposer une offre plus complète sur le
territoire et offre également la possibilité à l’économie classique de s’intégrer sur de
nouveaux marchés en investissant les campagnes. Par exemple, l’alimentation des villes et
des centres urbains par des produits consommés en circuit court, issus des campagnes
proches, est un des enjeux majeurs de cette coopération.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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II. C. 3) Développer le tourisme
L’économie touristique de l’Ardèche verte ne représente qu’environ 4% de l’économie
locale et 2,5% des emplois7. Même si le potentiel touristique du Pays est grand (paysages
variés, activités de nature multiples, patrimoine architectural valorisé...) dynamiser
l’activité touristique reste un enjeu fort pour le territoire. En parallèle, l’ESS est
particulièrement implantée dans les secteurs des sports et loisirs, de la culture et de
l’environnement : 97% des structures du secteur des arts et spectacles appartiennent à
l’ESS et 84% pour les sports et loisirs. Coopérer autour d’un projet touristique territorial
constitue un travail indispensable en vu de la création de produits touristique attractifs.
Pour cela un travaille commun entre ces structures, qui disposent d’une offre d’activité très
importante, et celles de l’économie classique (offre d’hébergement de groupe, hôtellerie,
restaurateurs etc.) est primordial. (Cf. Annexe 3 : Pistes d’action en faveur de l’ESS sur le
territoire de l’Ardèche verte)
En matière de tourisme l’ESS est également à l’origine du tourisme social qui peut se
définir comme « l’ensemble des rapports et des phénomènes résultant de la participation
au tourisme et en particulier de la participation des couches sociales à revenus
modestes ». L’objectif du développement de ce type particulier de tourisme étant d’attirer
des groupes aux revenus modestes locaux ou provenant des grandes agglomérations
proches (Lyon, Vienne, Valence etc.). Cette réflexion territoriale doit être menée de façon
collective en intégrant, comme nous l’avons vu ci-dessus, l’ensemble des structures du
territoire qu’elles soient de l’ESS ou non.
La coopération entre économie classique et ESS représente donc un enjeu particulier
dans le développement économique du territoire de l’Ardèche verte : par sa capacité à créer
7 Hervé SAULNIER & MDP Ingénierie Conseil, « Schéma de développement et d’aménagement
touristique », 2010.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
35
de l’activité, à sécuriser et à créer de l’emploi, par l’apport de nouvelles rentes territoriales,
par le développement de nouvelles activités telles que le tourisme etc. Mais cet apport ne
s’arrête pas là : il permet également d’apporter de nouvelles réponses aux enjeux
environnementaux ou sociaux, éléments indispensables au développement des territoires.
Si ces enjeux n’ont pas constitué de chapitres à part entière c’est que ces thématiques ont
été traitées de manière transversale tout au long de cette partie. En effet les structures de
l’ESS, porteuses de projets sociaux et environnementaux, permettent d’intégrer ces
problématiques au travers de ces coopérations.
Comme nous venons de le voir, il existe de nombreuses formes de coopération entre
ESS et économie classique. Engager un travail commun peut être le fruit de l’initiative de
ces structures, néanmoins elles se font rarement de manière spontanée. Le climat de
méfiance et les intérêts divergents qui subsistent entre ces structures constituent un grand
frein dans cette perspective. Ces pourquoi nous allons nous demander comment les élus
territoriaux peuvent avoir un rôle primordial pour encourager la rencontre et le travail entre
ces deux secteurs.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
36
PARTIE III
Quel rôle l’engagement politique peut-il jouer dans le rapprochement de ces deux mondes ?
La coopération entre ESS et économie classique joue donc un rôle particulier sur le
développement du territoire auquel ces économies appartiennent. Néanmoins pour mener à
bien cette collaboration nous allons voir que les élus locaux ont un rôle déterminant. Dans
une première partie nous nous intéresserons au lien qui existe entre ESS et collectivités
territoriales et comment il s’illustre sur le territoire de l’Ardèche verte. Nous verrons que
cette coopération n’est pas toujours naturelle et que la volonté politique est essentielle pour
aller en ce sens. Dans une seconde partie nous verrons quels sont les différents rôles et les
multiples outils dont disposent les élus du territoire pour faciliter la rencontre entre
économie classique et ESS.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Chapitre A Les liens entre ESS et monde politique
Pourquoi les élus municipaux, communautaires, régionaux ou départementaux ont-ils un
rôle tout particulier à jouer dans l’accompagnement des structures de l’ESS ? Pourquoi la
coopération entre ces deux mondes est-t-elle un enjeu pour le territoire ? Nous allons nous
intéresser dans ce chapitre aux processus qui font de l’ESS et des pouvoirs publics des
acteurs singulièrement proches.
III. A. 1) Des valeurs communes
L’intérêt général
Les valeurs telles que la solidarité ou la non-lucrativité sont partagées par le monde de
l’ESS comme par celui des pouvoirs publics. Ces principes font de ces deux mondes des
piliers du développement local. En effet, ils s’inscrivent chacun dans des actions en faveur
de l’intérêt général et du bien-être collectif. La complémentarité entre leurs actions ne fait
donc aucun doute, néanmoins certaines conditions doivent être remplies pour assurer une
bonne coopération entre ces deux mondes.
Dans un premier temps, il est essentiel que ces deux acteurs prennent conscience de leur
complémentarité et se reconnaissent autour d’un territoire d’action commun, c'est-à-dire
qu’il existe un réel sentiment d’appartenance au même territoire. Pour ce faire les
structures de l’ESS doivent au préalable se connaitre et se côtoyer. Ces réseaux doivent
permettre d’améliorer leur lisibilité sur le territoire et de mieux faire valoir leurs intérêts.
Les acteurs de l’ESS de l’Ardèche verte doivent surmonter cette difficulté : faute d’une
mauvaise connaissance entre structures de l’ESS, les élus du territoire sont en incapacité
d’avoir une bonne lecture de l’ESS. Ici aussi le principe de sentiment d’appartenance
révèle toute son importance : la collaboration entre structures de l’ESS est un préalable
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
38
indispensable pour rendre lisible leurs actions auprès des élus et d’engager une
coopération.
Les enjeux de cette collaboration sont multiples notamment pour travailler
conjointement en faveur d’un développement. Le territoire de l’Ardèche verte fait face à
des évolutions qui font évoluer considérablement les besoins et les attentes de la
population du territoire. Les collectivités doivent identifier les nouveaux besoins de leur
population, et leurs évolutions et, si elles n’ont pas les moyens d’y répondre, solliciter les
structures de l’ESS. Les pouvoirs publics ont toute la légitimité pour remplir cette mission
de diagnostics partagés citoyens puisqu’ils bénéficient d’une vision globale et entière du
territoire.
Nous pouvons nous interroger sur les risques de cette association. L’ESS ne doit pas
remplacer le rôle de l’Etat en matière d’action sociale et devenir, ce que nomme Matthieu
HELY, une « béquille de l’Etat social » face au déclin de son intervention dans ce
domaine. Il convient donc d’être attentif à ce que les pouvoirs publics ne se désintéressent
pas de leur intervention sociale et ne se reposent pas à outrance sur l’ESS.
Vers une gouvernance territoriale
Nous pouvons définir la gouvernance territoriale comme « un processus non seulement
de coordination des acteurs mais aussi d’appropriation des ressources et de construction
de la territorialité »8. Cela implique donc la prise en compte de l’ensemble des types
d’acteurs présents sur un territoire (entreprises privées, associations, citoyens,
institutions…) dans la définition et l’application d’un projet de territoire. Ce type de
gouvernance implique également la proximité géographique pour agir efficacement sur le
8 LELOUP Fabienne, MOYART Laurence et PECQUEUR Bernard (2005), « La gouvernance territoriale
comme nouveau mode de coordination territorial », Géographie, Economie, Société, avril 2005
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
39
local. La prise en compte des structures de l’ESS s’impose ici comme un point décisif de
cette dynamique : largement acteur de leur territoire, la concertation pour réaliser un
objectif commun et cohérent implique la prise en compte de leurs actions et des éventuels
manquements sur le territoire. Cette dynamique de collaboration autour d’un objectif
commun peut constituer le point de départ d’une rencontre entre ESS et économie
classique. Les élus locaux sont en capacité de solliciter ces acteurs autour d’un projet de
territoire et d’un espace commun de travail.
III. A. 2) Quelles relations entretiennent ces deux mondes ?
Une reconnaissance de plus en plus forte
Comme nous l’avons vu précédemment, l’échelon national s’est investi en faveur de
l’identification, de la connaissance et de la reconnaissance de ce qu’est l’ESS, via un projet
de loi en faveur de l’ESS. L’émergence de politiques locales de soutien spécifiques à l’ESS
est également en marche : à l’échelle régionale, départementale, des intercommunalités ou
à celle des agglomérations. Outre le soutien qu’elles apportent à ces structures en matière
de développement et d’accompagnement, ces politiques publiques ont pour vocation
d’apporter une plus grande reconnaissance à ces structures et de faciliter leur lisibilité.
Qu’en est-il sur le territoire de l’Ardèche verte ?
Initiative unique en France, l’Etat et la région Rhône-Alpes ont signé en 2007 le premier
Contrat Economique Sectoriel en faveur de l’ESS (CES ESS). Fort de son succès, le
contrat a été renouvelé pour la période 2011 - 2013 pour un financement total de 33,8
millions d’euros. Ses actions se déclinent en trois axes : la promotion du secteur de l’ESS
pour palier à sa méconnaissance, l’appui aux projets ESS fortement impliqués dans le
développement de leur territoire et la mise en place de mesures favorisant l’innovation et la
qualification des emplois. La mise en œuvre de ce contrat a été déléguée à la CRESS de
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
40
Rhône-Alpes qui rempli donc de multiples fonctions : coordination des actions, promotion
du programme et suivi des actions menées pour la réalisation des objectifs du contrat.
C’est en 2013 que le département de l’Ardèche adopte son premier budget spécifique au
secteur de l’ESS. Même si le département ne dispose pas d’un plan d’aide spécifique, il
apporte un appui financier à ces structures et aux initiatives locales de mise en place de
politique spécifique. C’est ainsi que le Pays de l’Ardèche verte a bénéficié de son soutien
pour la réalisation de son plan d’action en faveur de l’ESS. La création d’une stratégie
territoriale spécifique à l’ESS en Ardèche verte marque une première ouverture des lignes
classiques à l’ESS et ainsi une pondération des frontières entre ESS et économie classique.
Une collaboration difficile
L’ESS bénéficie donc d’un soutien de plus en plus fort à plusieurs échelles (Etat,
région, département et intercommunalité) néanmoins les relations à plus petites échelles ne
sont pas toujours faciles. Comme nous l’avons vu, mener une politique territoriale en
s’appuyant sur l’ESS aurait toute sa légitimité, néanmoins la méfiance entre élus et
structure de l’ESS freine cette dynamique.
En effet la méconnaissance de ce qu’est l’ESS et ses leviers d’action est un frein à la
prise en compte de l’ESS comme un réel acteur économique et social du territoire. Il est
d’autant plus difficile de démontrer cette utilité qu’il est difficile de mesurer le bénéfice du
« service rendu » par l’ESS au territoire ou aux populations. Enfin l’ESS souffre d’une
image d’« économie de réparation », elle n’est pas considérée comme un créateur de
richesse mais comme moyen de palier à certaines difficultés de l’économie classique. Ce
constat s’est avéré particulièrement criant en Ardèche verte.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
41
Face aux constats que nous venons de faire sur les difficultés entre monde politique et
secteur de l’ESS à se connaitre, se rencontrer ou travailler ensemble, l’implication du
développeur territorial semble indispensable. En premier lieu, il est essentiel de mener un
travail d’information et de sensibilisation. Celui-ci doit se faire auprès des élus locaux afin
qu’ils se familiarisent avec la notion d’économie sociale et solidaire mais aussi de son
implication locale. Mais ce travail doit aussi être mené auprès des structures de l’ESS pour
favoriser une meilleure appréhension de leur rôle territorial et des bénéfices qu’elles
peuvent tirer d’un travail en collaboration avec les collectivités territoriales.
Une fois cet apprentissage commun effectué, nous allons voir que les élus locaux
peuvent avoir un rôle déterminant dans la rencontre entre ESS et économie classique. Nous
venons de le voir, travailler conjointement avec les structures de l’ESS n’est pas toujours
naturel et la volonté politique est un facteur essentiel dans cette rencontre. Il en est de
même pour les processus que nous allons développer ci-dessous.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
42
Chapitre B Les outils mobilisables par les élus pour faciliter ce rapprochement
Dans ce chapitre nous allons nous demander comment les élus locaux peuvent devenir « le
point de rencontre » entre ESS et économie classique. L’articulation entre ces deux
secteurs doit se faire autour d’un acteur commun et nous proposons ici de comprendre
comment les élus peuvent remplir cette mission. Nous proposons ici une déclinaison
s’articulant autour de deux types d’interventions : être acteur dans cette rencontre et avoir
un rôle de facilitateur. Néanmoins, il est essentiel de préciser que dans la réalité, ces
actions ne peuvent être indépendantes et qu’elles doivent s’articuler de manière combinée
et complémentaire.
III. B. 1) Rôle d’acteur
Plusieurs outils sont mobilisables par les élus locaux pour permettre aux entreprises de
l’économie classique et à celles de l’ESS de travailler ensemble. Il faut noter que la mise
en place de tels outils dépend d’une réelle volonté et d’une affirmation idéologique
indispensable.
Les clauses sociales d’insertion
L’article 14 du code des marchés public adopté en 2001 donne la possibilité aux
pouvoirs publics d’intégrer dans la commande d’un marché public une clause visant à
imposer un quota de travailleurs en situation d’insertion. Celui-ci peut s’exprimer en
nombre d’heures travaillées ou en pourcentage de temps de travail. Les entreprises qui
remportent alors le marché peuvent soit recourir à une embauche directe, soit utiliser la
mise à disposition de personnels (via un GEIQ ou un ETTI, Entreprise de Travail
Temporaire d’Insertion), soit faire appel à des SIAE en sous-traitance. Cette collaboration,
dans le cadre d’un marché public, peut prendre la forme d’une co-traitance ou d’une sous-
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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traitance. Ces solutions constituent un cadre avantageux pour les entreprises et pour les
travailleurs concernés : le suivi et l’encadrement du personnel en insertion sont réalisés par
la structure d’insertion car elle en est l’employeur direct. Par leurs missions et compétences
particulières elles sont en mesure de favoriser une meilleure intégration dans l’entreprise et
de mettre en place un suivi social de la personne. Ces solutions permettent également
d’apporter une réelle garantie aux entreprises et de répondre à leurs inquiétudes sur la
qualité du travail fourni ou aux pénalités de non respect des délais.
Comme nous l’avons vu précédemment, les enjeux liés à l’insertion par l’activité sont
important sur le territoire, mais ce sont également des structures qui ont besoin de se
structurer. Ces commandes publiques responsables représentent un enjeu fort pour assurer
la viabilité des structures de l’insertion et leur assurer des marchés, mais aussi pour faire
travailler ces structures avec des structures de l’économie classique. Néanmoins, sur le
territoire, les clauses d’insertion ne sont que très rarement utilisées dans les marchés
publics. Elles sont majoritairement le fruit d’une volonté forte d’agir en ce sens et de ce
fait l’engagement politique montre ici tout son intérêt.
Sur le même modèle les marchés publics peuvent se doter de clauses
environnementales. Ces clauses peuvent aussi être en faveur des structures de l’ESS, car
elles sont particulièrement implantées dans les domaines des déchets, des retraitements ou
de toutes autres activités écologiques. Les clauses environnementales sont donc elles aussi
créatrices de coopération entre différents acteurs économiques.
Les SCIC
Les SCIC (Société Coopérative d’Intérêt Collectif) sont « des entreprises coopératives
dont le projet, d’utilité sociale, répond à un besoin collectif identifié par exemple sur un
territoire, ou dans une filière professionnelle. La SCIC permet, grâce au multi sociétariat,
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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d’associer à son projet tous les acteurs qui y sont liés : salariés, usagers bénéficiaires,
bénévoles, entreprises, associations, collectivités locales… »9. Grâce à cette forme de
coopération les collectivités territoriales ont donc la possibilité de s’impliquer directement
dans un projet économique en faveur de leur territoire et de son développement.
L’Ardèche verte a été marquée par une grande réussite : la SCIC Nectardéchois. Cette
coopérative propose aux particuliers et aux agriculteurs de transformer et mettre en
bouteille leurs propres fruits. Créé en premier lieu en statut associatif Nectardéchois adopte
en 2012 le statut de SCIC dans le but de conforter son rôle d’acteur du territoire. Cette
société est composée de quatre collèges : les usagers, les salariés, les collectivités locales et
les prestataires. A l’ouverture, la capacité de production de Nectardéchois ont largement
évolués au fil des années. Aujourd’hui, la production atteint les 250 000 litres par an
(environ 200 000 bouteilles) pour une fréquentation de 300 à 400 personnes10
. Cette forte
augmentation de la production s’est accompagnée d’une importante diversification de
l’activité (nouveaux modes de distribution, projet touristique et éducatif etc.).
C’est toute la commune qui profite de cette activité : Nectardéchois compte cinq
emplois permanents, auxquels s’ajoutent les emplois saisonniers. Cette structure est un réel
facteur d’attractivité pour cette petite commune de 289 habitants. C’est pourquoi les
collectivités territoriales n’ont pas hésité à s’intégrer dans cette société et possèdent
aujourd’hui 20% des droits de vote. Les bénéfices de cette implication sont doubles : les
collectivités soutiennent l’activité économique, l’emploi et promeuvent les ressources de
leur territoire, tandis que l’entreprise est en capacité d’envisager un développement en
phase avec son territoire.
9 URSCOP (http://www.scop.org)
10 Site du département de l’Ardèche (http://entreprendre.ardeche.fr) « Néctardéchois ou entreprendre
autrement », avril 2012
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
45
Largement impliquées dans l’économie marchande, les SCIC possèdent toute la légitimité
d’amorcer des collaborations avec les entreprises classiques (ici en matière de
conditionnement ou de distribution par exemple). Les élus locaux ont un rôle décisif dans
cette dynamique : ils représentent tout d’abord une force de proposition majeure pour
mener la société dans cette direction, mais ils sont également un gage de sécurité pour les
entreprises classiques.
Néctardéchois est l’unique SCIC en Ardèche verte. Ce constat est-il le signe d’un
manque d’intérêt pour ce type de coopération ? Il semble plus que cela soit amputable à
une méconnaissance de cet outil et un manque de dialogue entre ces deux mondes, qui ne
partagent pas leurs idées et leurs projets.
III. B. 2) Rôle de facilitateur
Créer des réseaux
Les collectivités territoriales peuvent constituer un intermédiaire adéquat pour favoriser
la rencontre entre structure de l’ESS et économie classique. En effet, afin de créer de la
coopération entre ces structures il est au préalable indispensable d’identifier les
problématiques communes et les synergies possibles. Pour cela les collectivités territoriales
disposent d’une vision complète du territoire et des dynamiques qui le composent. Ils ont
donc pour mission de palier à la mauvaise lecture du tissu économique local que peuvent
avoir certaines entreprises de l’économie classique, dû au fait qu’elles sont peu intégrées
sur leur territoire. L’objectif étant, comme nous avons pu le voir précédemment, d’intégrer
les structures de l’ESS dans les filières, les clubs d’entrepreneurs, les groupements etc.
Dans cette logique, les élus peuvent constituer, de manière formelle ou informelle, le lien
entre ces structures et ainsi encourager une relation de confiance.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
46
Les élus doivent également remplir un rôle de communication pour encourager cette
coopération. Et cela dans l’objectif d’améliorer la connaissance, par les entreprises de
l’économie classique, de ce qu’est l’ESS, des outils dont elle dispose et de l’offre qu’elle
propose localement. En effet, il est indispensable pour les entreprises classiques de
dépasser les « idées reçues » dont souffre l’ESS et qui freinent cette collaboration : « peu
concurrentes », « dépendantes des pouvoirs publics », « cantonnées aux secteurs de la santé
et de l’aide à la personne » etc. Il est indispensable de surmonter ce climat de méfiance qui
existe entre ces deux secteurs.
Agir sur l’intégration des structures ESS
Les pouvoirs publics ont un rôle à jouer dans l’amélioration de l’accès aux dispositifs de
droits communs des structures de l’ESS, et notamment en matière de financement, de
crédit ou encore de création d’activité.
Le dispositif « Créafil » porté par la région Rhône-Alpes et s’articulant autour de
réseaux locaux, a pour objectif d’apporter informations et soutien à tout porteur de projet
grâce à des portes d’entrée localement implantées. La reconnaissance de l’ESS comme
option de création de reprise d’activité, au mettre titre que les outils classiques, a constitué
un enjeu important par l’intégration des dispositifs d’accompagnement ESS dans les relais
locaux, tels que les sites de proximité ou les pépinières. Ainsi, la Communauté de
communes du Bassin d’Annonay s’est dotée d’une pépinière et d’un hôtel d’entreprises sur
le site de Vidalon (ancienne manufacture de Canson) où de nombreux entrepreneurs sont
accompagnés dans leur création d’activité et peuvent disposer de locaux adaptés. Le réseau
ITESS (réseau de trois CAE) s’est intégré dans cette dynamique dans l’optique
d’accompagner et de proposer leurs services aux jeunes entrepreneurs.
Il convient également de faciliter l’intégration des structures de l’ESS au sein d’un
dialogue social territorial. A ce titre l’USGERES (Union des Syndicat et Groupements
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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d’Employeurs Représentatifs dans l’Economie Sociale) a été intégré dans les discutions sur
les orientations stratégiques du CTEF de l’Ardèche verte.
La finance solidaire, outil de réappropriation citoyenne
« Les finances solidaires sont constituées de circuits financiers reliant, d’une part, des
investisseurs (personnes physiques ou morales) souhaitant utiliser leur argent de manière
responsable et, d’autre part, des activités utiles à la cohésion sociale, à la lutte contre
l’exclusion ou au développement durable »11
.
Les crises boursières et financières sont à l’origine d’une demande croissante de
garantie éthique dans l’utilisation de l’épargne citoyenne. C’est pourquoi la finance
solidaire est aujourd’hui un outil en plein expansion. Elle peut être utilisée à des fins
diverses : l’acquisition de terres agricoles pour faire face à la déprise agricole, le soutien à
une agriculture biologique et locale (transformation des modes de production, des modes
de distributions…), le financement d’activités émergentes éthiques (insertion…), des
projets d’habitat ou d’énergie renouvelable etc. La finance solidaire peut prendre
différentes formes telles que les CIGALES (Clubs d’Investisseurs pour une Gestion
Alternative et Locale de l’Epargne Solidaire), les banques coopératives, les produits
financiers solidaires…
Certains types de projets peuvent être co-financés par les collectivités territoriales et les
citoyens du territoire, les initiatives les plus courantes étant des projets énergétiques ou
d’habitats collectifs. Encore une fois les élus portent ici un rôle de garantie et de soutien de
ces initiatives. La présence des associations citoyennes permettent aux citoyens du
territoire de se réapproprier les différents enjeux du territoire. L’intégration des processus
11
« Proposition pour développer les outils financiers éthiques et solidaires », le Labo de l’Economie Sociale
et Solidaire, janvier 2013.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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participatifs dans les enjeux du territoire doivent inciter les citoyens du territoire à
s’orienter dans cette logique d’investissements locaux. Bien que cette démarche ait été
initiée sur des territoires limitrophes (à l’image du projet éolien sur la Communauté de
communes des Monts du Pilat), aucune initiative n’a été menée sur le territoire de
l’Ardèche verte. La constitution d’un collectif « finance solidaire » marque néanmoins
l’émergence d’un intérêt pour cette thématique. Le soutien des élus et techniciens du
territoire est indispensable pour encourager cette démarche et développer de nouveaux
outils au service de la finance locale. (Cf. Annexe 3 : Pistes d’action en faveur de l’ESS sur
le territoire de l’Ardèche verte)
Cet exemple nous permet de saisir comment l’ESS peut influencer le monde de
l’économie classique. En effet, les financements solidaires s’attachent le plus souvent à des
critères « extra-économiques » dans le sens où, bien que les critères de rentabilité soient
également pris en compte, les critères environnementaux, éthiques ou encore sociaux sont
importants dans ces types d’investissements.
Il existe donc de nombreux moyens d’actions mis à disposition des pouvoirs publics
pour favoriser cette rencontre entre économie classique et ESS. Néanmoins, l’affirmation
d’une volonté politique forte de jouer en faveur de ce secteur reste indispensable dans cette
perspective. La réalisation d’un plan d’action en faveur de l’ESS sur le territoire constitue
la première pierre de cette mobilisation. Néanmoins, nous avons pu le voir, le chemin reste
encore long aux échelles plus locales, où les enjeux liés au développement des structures
de l’ESS ne sont pas toujours partagés.
Au cours de nos travaux sur le territoire, nous avons identifié une réelle méconnaissance
des l’ESS, des outils mobilisables et des enjeux liés à ce secteur. Ce travail de
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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sensibilisation doit être mené par les techniciens dans le but d’accompagner les élus, une
mission qui doit être constante du aux renouvellements des élus ou aux changements de
missions des élus.
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
50
CONCLUSION
Tout au long de notre développement, nous avons vu comment la collaboration entre ESS
et économie classique, une connaissance réciproque, des échanges d’expériences, de
valeurs, de savoir-faire, un travail collaboratif ou mutualisé, constituent des atouts certains
pour ces deux secteurs et pour le territoire de l’Ardèche verte. Si cette collaboration montre
toute sa légitimité pour réduire le chômage, créer de l’activité ou diversifier les revenus du
territoire, ces enjeux vont plus loin en apportant des réponses innovantes sur des questions
environnementales, sociales ou éthiques.
Nous avons également observé que les pouvoirs publics pouvaient jouer un rôle
primordial pour encourager et accompagner cette collaboration. Mais que cette perspective
était largement dépendante de l’affirmation d’une volonté politique locale. La réalisation
d’un plan d’action en faveur de l’ESS sur le territoire de l’Ardèche verte, auquel j’ai eu la
chance de participer, constitue un premier pas non négligeable vers une appropriation de
ces enjeux. En effet, il est l’affirmation de cet engagement politique mais a également pour
vocation d’encourager cette mobilisation. En effet de nombreuses pistes d’action existantes
ou émergeantes s’attachent à répondre au manque d’information et de sensibilisation des
élus et des institutions du territoire.
La transversalité des enjeux liés à la thématique de l’ESS a constituée, dans la
réalisation de ce mémoire et de cette mission de stage, un intérêt tout particulier, mais
également une difficulté inhérente au sujet. Pour mener à bien cette mission, une lecture
parfaite et entière du territoire s’est avérée indispensable : ses enjeux, ses ressources, ses
contraintes, ses blocages… et cela dans tous les domaines (tourisme, culture,
développement durable, économie, agriculture, aménagement…). Ce travail de terrain de
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
51
longue haleine a permis de mettre évidence l’intérêt de disposer d'une vision généraliste du
territoire.
Ainsi, l’hétérogénéité des structures de l’ESS, a mis en valeur des volontés, des
perceptions et des intérêts différents. L’empathie s'est révélée une qualité majeure afin
d’apporter des réponses à chacun de ces acteurs et de faire valoir les intérêts de chacun.
Enfin le manque de connaissance du concept de l’ESS et le manque d’intérêt pour cette
thématique, notamment de la part des élus locaux, a été un frein dans ce travail. Informer,
présenter et porter à connaissance ont été des missions importantes pour garantir la réussite
de cette mission et pour favoriser la bonne mise en pratique des actions préconisées.
Par la rédaction de ce mémoire nous avons montré tout l’intérêt d’un rapprochement
entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte. L’objectif étant d’en
faire émerger une économie plurielle. En bilan, nous pouvons nous interroger sur l’objectif
de cette démarche : un simple rapprochement, où ESS et économie classique travaillerait
en collaboration mais garderait leurs spécificités, ou la création d’une économie
symbiotique, hybride, une « nouvelle » économie intégrant et articulant les enjeux sociaux,
écologiques et éthiques ?
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
52
BIBLIOGRAPHIE
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Articles
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Documents internes
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Mireille DOMENGE-VIGNERON pour l’INSEE Rhône-Alpes, « Synthèse locale Ardèche
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Hervé SAULNIER & MDP Ingénierie Conseil, « Schéma de développement et
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Sites internet
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www.pays-ardeche-verte.fr
www.caprural.org
www.cress-rhone-alpes.org
www.la-nacre.org
www.lelabo-ess.org
www.projetdeterritoire.com
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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www.ressources-solidaires.org
www.scop.org
www.entreprendre.ardeche.fr
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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GLOSSAIRE
Acronyme Libellé
ADMR Aida à Domicile en Milieu Rural
CAE Coopérative d’Activité et d’Emplois
CDDRA Contrat de Développement Durable Rhône-Alpes
CES Contrat Economique Sectoriel
CIGALES Clubs d’Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l’Epargne
Solidaire
CIGALES Clubs d’Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l’Epargne
Solidaire
CLAP Connaissance Locale de l’Appareil Productif
CN CRES Conseil National des Chambres Régionales de l’Economie Sociale
CNLAMCA Comité National de Liaison des Activités Mutualistes, Coopératives et
Associatives
CPDT Conduite de Projets de Développement Territorial
CRESS Chambre Régionale d’Economie Sociale et Solidaire
CTEF Contrat Territorial Emploi Formation
DIRECCTE Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la
Consommation, du Travail et de l’Emploi
DLA Dispositifs Locaux d’Accompagnement
ESS Economie Sociale et Solidaire
ETD projET De territoire
ETF Entrepreneurs de Travaux Forestiers
ETTI Entreprise de Travail Temporaire d’Insertion
ETP Equivalent Temps plein
GEIQ Groupement d’Employeurs pour l’Insertion et la Qualification
HLM Habitation à Loyer Modéré
IAE Insertion par l’Activité Economique
INSEE Institut national de la statistique et des études économiques
ITESS Initiatives Territoriales de l’Economie Sociale et Solidaire
PME Petite et Moyenne Entreprise
PMI Petite et Moyenne Industrie
PTCE Pôles Territoriaux de Coopération Economique
RA Rhône-Alpes
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SA Société Anonyme
SARL Société Anonyme à Responsabilité Limitée
SCIC Société Coopérative Intérêt Collectif
SCIC Société Coopérative d’Intérêt Collectif
SCOP Société COopérative et Participatives
SEMAD Service d’Entraide et de Maintien à Domicile
SIAE Structures de l’Insertion par l’Activité Economique
SIREN Système d’Information des Répertoire des ENtreprises
SMAC07 Scène de Musique Actuelle de l’Ardèche 07
TIC Technologies de l’Information des Communications
TPE Très Petite Entreprise
URSCOP Union Régionale des Sociétés Coopératives et Participatives
USGERES Union des Syndicat et Groupements d’Employeurs Représentatifs dans
l’Economie Sociale
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX
Figure 1 : Evolution des effectifs salariés en Ardèche .................................................................................... 15
Figure 2 : carte du poids de l'ESS en Ardèche verte. ....................................................................................... 23
Figure 3 : L'Ardèche verte : un territoire hétérogène....................................................................................... 32
Tableau 1 : Les différents types de coopérative .............................................................................................. 10
Annexe 1 : Carte du Pays Ardèche verte…………………………………………………………………...…58
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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ANNEXE 1 : Carte du Pays Ardèche verte
Source : Syndicat Mixte de l’Ardèche verte
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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ANNEXE 2 : Guide des entretiens menés auprès des structures de l’ESS
Généralités
1. Nom
2. Prénom
3. Poste occupé dans la structure
Description de la structure
4. Nom de la structure
5. Année de création de la structure
6. Statut
7. Secteur d'activité
8. Missions principales de la structure
9. Grandes étapes du développement de l'entreprise
10. Nombre de salarié et ETP
11. Prévision de l'évolution de la structure
12. Rencontre de difficultés
Réseau de l’ESS
13. Avez-vous des relations formelles avec des entreprises locales ?
14. Avez-vous des relations informelles avec d'autres entreprises locales ?
15. La structure fait-elle partie d'une association ou d'un réseau local ?
16. Si oui, quel est son objectif ?
17. Connaissez-vous des entreprises qui travaillent sur la même thématique implantées
localement ?
18. Avez-vous le sentiment d'appartenir au monde de l'ESS ?
19. Diriez-vous que l'ESS est un secteur reconnu (grand public, institutions...) ?
Le territoire
20. Quelle est votre perception de votre territoire (échelle, forces, faiblesses ...)
21. Quel public est visé par vos actions ?
22. Avez-vous une politique en termes d'éloignement des salariés ? Des fournisseurs ? Des
collaborateurs ?
Le mois de l'ESS
23. Avez-vous participé au dernier mois de l'ESS (novembre 2012) ?
24. Si oui, de quelle manière ? (visiteur, organisateur, participant...)
25. Si vous y avez participé dans le cadre de votre structure quelles actions avez-vous
mené?
26. Quel est votre retour sur cet événement (nationalement / localement) ?
27. Êtes-vous prêt à participer au prochain mois de l'ESS ?
28. Si oui, y-a-t-il des thèmes qu'il serait intéressant d'aborder selon vous?
Retour de l'entretien
29. Souhaitez-vous aborder un autre sujet ?
30. Avez-vous des attentes vis-à-vis de cette mission ?
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ANNEXE 3 : Pistes d’action en faveur de l’ESS sur le territoire de
l’Ardèche verte (septembre 2013)
Version intégrale disponible sur le site internet du Pays Ardèche verte
(www.pays-ardeche-verte.fr/)
Encourager la création de filières dynamiques
Constats :
-Peu de filières actives sur le territoire
-L’économie du territoire doit engager une nécessaire reconversion mais peu de nouveaux
marchés, de nouveaux produits…
-Certains secteurs rencontrent des problématiques communes
Préconisations :
-Encourager la création de groupements dans des secteurs de l’économie classique
Outils :
-Organiser des rencontres entre établissements du même secteur
-Soutenir les Coopératives d’Activités et d’Emploi thématiques
Encourager la coopération et la mutualisation entre structures de l’insertion et de la
formation
Constats :
-Ces entreprises de ce secteur d’activité sont fragilisées, elles doivent faire face à des
baisses de subventions, des problèmes financiers et organisationnels
-Des projets émergent mais manquent de coopération ou de partenariats
Préconisations :
-Encourager la mutualisation (gestion, RH, organisation, trésorerie…) entre ces structures
pour assurer leur développement (réponse aux marchés) et la création de nouvelles
activités
-Encourager la coopération en vue de développer de nouvelles offres
Outils :
-Faire émerger et faire vivre des lieux de rencontre (physiques ou dématérialisés) dédiés
aux structures de l’insertion et de la formation pour se rencontrer, se faire connaitre et
travailler conjointement
-Assurer une communication commune pour une meilleure lisibilité de l’offre existante
sur le territoire (plaquette…)
Quel rapprochement entre ESS et économie classique sur le territoire de l’Ardèche verte ? 2013
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Soutenir les évolutions de l’agriculture
Constats :
-Problématiques liées à l’emploi des saisonniers (logement, succession de courtes
missions, transport…) et des agriculteurs (remplacements…)
Préconisations :
-Palier aux difficultés des saisonniers par un partenariat avec les structures d’insertion par
l’activité économique, les acteurs sociaux, les communes etc.
-Encourager la mutualisation des emplois au bénéfice des agriculteurs et des saisonniers
(enchainer des missions, pluriactivité et pluriqualification, navettes de transport…)
Outils :
-Réaliser un état des lieux des difficultés rencontrées par les saisonniers et sensibiliser les
acteurs sociaux sur cet enjeu
-Sensibiliser et informer sur les formes de regroupements
Développer le tourisme sur le territoire
Constats :
-Un public visé : les groupes aux budgets modestes
-Le territoire manque d’une offre d’hébergement de groupe et de « produits touristiques »
afin de proposer des séjours clés en main
-Les prestataires touristiques rencontrent des difficultés à s’assurer un revenu tout au long
de l’année
Préconisations :
-Développer des réseaux et des partenariats entre les acteurs du tourisme, en renforçant le
rôle fédérateur des Offices du Tourisme et des Coopératives d’Activités et d’Emploi
(CAE)
-Engager des formations sur les produits touristiques
-Pour les projets touristiques, étudier les nouveaux modes de gestion offerts par l’ESS
(SCIC…)
-Encourager le développement de la pluriactivité par une ouverture des activités du
secteur classique à celui de l’ESS (métiers d’art, agroalimentaire, agriculture…)
Outils :
-Etat des lieux de l’offre touristique et des possibles complémentarités
-Organiser des réunions pour engager de la coopération et de la mutualisation
-Faire des Offices du Tourisme des lieux de rencontre, de formation et de travail
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Sensibiliser sur la finance locale, outil de développement du territoire
Constats :
-Il existe de nombreux dispositifs destinés à la finance et à l’épargne locale
-Peu de connaissance de ces dispositifs
-Des capacités d’épargne non mobilisées au profit du territoire
-Un collectif actif pour organiser une soirée/débat finance solidaire
Préconisations :
-Favoriser la sensibilisation et l’information sur cette thématique (élus, établissements,
citoyens…)
-Rencontrer les opérateurs relais et développer des partenariats avec le territoire
(permanences au sein des espaces économiques etc.)
-Développer de nouveaux outils de mobilisation de l’épargne locale sur le territoire
Outils :
-Sensibiliser et informer la population et les acteurs économiques sur la finance locale
-Accompagner le collectif « finance solidaire » dans l’organisation d’une soirée puis dans
la mise en place d’autres projets concernant cette thématique
POULAIN Katheleen
Quel rapprochement entre l’ESS et l’économie classique en Ardèche verte ?
Deuxième année de Master « Conduite de Projets et Développement territorial ».
Université de Grenoble, septembre 2013.
61 pages.
L’Economie Sociale et Solidaire (ESS) est un secteur en plein essor. De plus en plus
reconnue pour son utilité sociale, pour son action en faveur du développement local,
objet d’une prochaine loi… l’ESS représente un nouvel enjeu majeur pour les
territoires. Néanmoins, elle doit encore faire face à de nombreux défis et notamment
celui de collaborer avec les entreprises de l’économie classique. Ce mémoire a pour
ambition de démontrer en quoi une collaboration entre ces deux « mondes » peut
être bénéfique pour ces deux secteurs ainsi que pour le développement du territoire
de l’Ardèche verte. Le rôle des élus locaux, notamment de leur engagement politique,
constituera un point clé dans ce développement.
Ce mémoire s’appuie sur un diagnostic territorial ainsi que sur la réalisation
d’entretiens menés sur le territoire de l’Ardèche verte. L’Ardèche verte constitue un
terrain d’étude particulièrement riche et intéressant, tant pour la place que l’ESS
occupe au sein de son économie, que pour les mutations qui s’y opèrent actuellement.
La multiplicité des thématiques territoriales traitées au cours de ce mémoire
témoigne de la transversalité de cette approche.
Territoire, Ardèche verte, Economie Sociale et Solidaire, coopération, engagement
politique…
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