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Construction d’une base de données de voix : intérêt pour la recherche en orthophonie et le
partage de pratiques
Etienne Sicard Professeur, Directeur de Recherches au LURCO INSA/GEI, 135 Av de Rangueil 31077 Toulouse Courriel : etienne.sicard@insa-toulouse.fr
Anne Menin -Sicard Orthophoniste Master en Sciences du Langage Chercheur associée au LURCO 8 rue de Nîmes 31400 Toulouse Courriel : anne.sicard2@orange.fr
Stéphanie Perrière Orthophoniste Chercheur associée au LURCO Institut Universitaire de la Face et du Cou – Nice 10 avenue Durante 06000 Nice Courriel : stephanie.perriere@gmail.com
Mots-clés : voix pathologiques, rééducation, base de données, classification, recherche, marqueurs
de pathologies, partage de pratiques
Résumé - Cet article porte sur l’intérêt d’une base de données de voix accessible à tous les
orthophonistes qu’ils soient cliniciens ou chercheurs. Dans le cadre d'une démarche de recherche au
laboratoire LURCO, équipe ERU 15, une base de données en ligne est en cours de réalisation. Elle
couvre de très nombreuses pathologies et âges classées suivant une nomenclature internationale.
Les échantillons de voix sont principalement une voyelle /a/ en voix normale, ainsi qu’une sirène sur
les sons /ou/ ou /a/, avant et après rééducation orthophonique. Dans cette base de données, nous
proposons des fiches formalisées avec une aide à l’interprétation des analyses spectrales fournies par
le logiciel Vocalab et des axes thérapeutiques adaptés à chaque type de pathologie. La démarche
permet de promouvoir la recherche, et s’inscrit dans le cadre des pratiques probantes. Elle est aussi
destinée à servir la pratique clinique.
Abstract - This article focuses on the importance of a voice database accessible to all pathologists
whether clinicians or researchers. As part of a research laboratory LURCO, team ERU 15, a data base
of pathological voices has been built. It covers many diseases and ages classified according to
international nomenclature. The voice samples are mainly a vowel / a / in a normal voice, and a siren
before and after speech therapy. The interpretation of spectral analysis and objective voice quality
indicators provided by the software Vocalab as well as therapeutic axis are provided for each type of
pathology. The approach allows to promote research, and is part of evidence-based practices. It is
also intended to serve clinical practice.
Key words: voice pathology, therapy, database, classification, research, pathological indicators,
sharing of best practices
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Introduction L’orthophonie doit se doter d’outils performants, précis, complets permettant de cibler la
rééducation et d’augmenter ainsi l’efficacité thérapeutique. Dans le cadre de la reconnaissance du
niveau master en orthophonie récemment acquis, la nécessité de répondre aux normes
internationales d’Evidence-Based Practices (Pratique basée sur des données probantes) s’impose.
Dans le cadre d’une démarche de recherche de l’ERU 15 du laboratoire LURCO, nous avons souhaité
sélectionner et mettre en œuvre un ensemble d’indicateurs de pathologies de la voix pertinents, afin
d’accompagner la rééducation orthophonique de manière illustrative, informative et précise. Une
étude bibliographique a été conduite pour comprendre et évaluer la pertinence des marqueurs de
pathologie les plus communs (Sicard, 2013b), afin de sélectionner un ensemble d’indicateurs le plus
pertinent. Pour valider ces indicateurs et définir leurs seuils de pathologie associés, il s’est avéré
indispensable de construire une base de données de cas de voix pathologiques conséquente. Le but
de cet article est d’expliciter les principales étapes que nous avons franchies pour construire et
mettre à disposition cette base de données. De plus, en adéquation avec les référentiels élaborés
pour la formation de Master en Orthophonie, nous avons associé à une sélection de cas de voix
pathologiques des fiches de synthèse incluant des données de bilan et de rééducation, que nous
proposons de détailler aussi.
Dans cet article nous exposons en première partie notre méthodologie, puis nous détaillons
l’élaboration de la base de données, les protocoles utilisés et des outils statistiques spécifiquement
développés, ainsi que les principaux résultats sur une centaine de cas de voix. Dans une deuxième
partie, nous détaillons la fiche permettant de synthétiser et illustrer l’évolution des performances
avant et après rééducation. Nous synthétisons ensuite les étapes de la démarche, discutons de
l’intérêt de la base de données et de la fiche synthétique, et concluons sur des démarches
prospectives.
1. Méthodologie Nous détaillons tout d’abord la nomenclature utilisée pour le classement des pathologies de la voix,
donnons quelques éléments sur la construction de la base de données de cas de voix, notamment sur
les aspects confidentialité, protocoles, formatage et mise en ligne.
1.1. Nomenclature
La base de données décrite dans cet article utilise une nomenclature pour coder les noms de fichiers
de voix, permettant ainsi de connaître la pathologie associée. Cette nomenclature, découpant les
pathologies de la voix en 9 classes principales (voir liste ci-dessous), est une traduction de la
classification proposée dans l'ouvrage de Verdolini (2006), travail commandé à l’origine par
l'American Speech-Language-Hearing (ASHA). Le détail de cette nomenclature est reporté en annexe
N°1, et peut être consultée en ligne au format numérique (Sicard et Menin-Sicard, 2012).
1000 MALADIES DU LARYNX STRUCTUREL 2000 INFLAMMATION DU LARYNX 3000 TRAUMATISME OU BLESSURE DU LARYNX 4000 CONDITIONS SYSTEMIQUES INFLUENCANT LA VOIX 5000 TROUBLES AERODIGESTIFS AFFECTANT LA VOIX 6000 TROUBLES PSYCHIATRIQUES ET PSYCHOLOGIQUES
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7000 TROUBLES NEUROLOGIQUES AFFECTANT LA VOIX 8000 AUTRE TROUBLES AFFECTANT LA VOIX 9000 AUTRES TROUBLES VOCAUX
Table 1 : Classification des pathologies de la voix proposée (Verdolini, 2006)
Le choix de cette classification s’est imposé de par le rayonnement international des travaux de
Verdolini, la caution de l’ASHA, la structuration pertinente, mais surtout une description détaillée de
chaque pathologie, étayée de nombreuses références, qui constitue un véritable état de l’art des
connaissances sur les pathologies de la voix (Verdolini, 2006).
1.2. Présentation de la base de données
De nombreuses banques de données de voix sont citées dans les publications scientifiques traitant
de l’évaluation et la rééducation de la voix. Nous listons une sélection d’articles traitant de ce sujet
dans (Sicard, et Menin-Sicard, 2013b). La plupart de ces études portent sur une centaine de cas de
voix, en général pour moitié normales et pour l’autre moitié des cas de pathologies variées. Certaines
études de synthèse telles que Wuyts (2000), Ghio (2008) ou Werth (2010) portent sur plusieurs
centaines jusqu’à plus d’un millier de cas de voix. Dans la plupart des cas, les échantillons sonores et
les données de base caractérisant le patient ne sont pas accessibles gratuitement, mais sont soit
associés à une licence logicielle (comme pour le Multi-Dimensional Voice Program, Deliyski 2012), soit
classés confidentiels et restreints à un usage interne en milieu hospitalier, donc difficilement
accessible pour les orthophonistes.
Dans le cadre de l’ERU 15 du laboratoire LURCO, 200 cas de voix ont été regroupés, dont 150 environ
sont pathologiques, avant et après rééducation orthophonique. Les échantillons mis en ligne
concernent principalement la production d'une voyelle /a/ en voix conversationnelle, d'une durée de
quelques secondes, et des sirènes. Dans le respect de la confidentialité de l’identité des patients
selon les règles de la CNIL, l'objectif est mettre les échantillons sonores librement accessibles sur
Internet (Sicard et Menin-Sicard, 2012). Les orthophonistes partenaires de l’ERU 15 ont effectué un
enregistrement de voyelle /a/ et de sirène (/a/, /ou/), tout d’abord en bilan, puis en fin de
rééducation. Les spectres des voix ont été analysés et commentés, complétés par une description
des axes thérapeutiques et des résultats fournis par les indicateurs du logiciel VOCALAB (Sicard et
Menin-Sicard, 2013) dans une fiche de synthèse construite à cet effet. Un exemple de fiche est
détaillé en deuxième partie de cet article.
Le but de la base de données est d’intégrer les pathologies de voix les plus diverses, tout en couvrant
des âges, sexe et contextes d’enregistrement différents. Les échantillons sonores sont de qualité
variable, plus ou moins bruités, tels que produits dans des cabinets d’orthophonie et non dans des
cabines audiométriques. Bien qu’enregistrés selon des consignes similaires, les échantillons sont
capturés avec des microphones et chaînes d’acquisition pouvant altérer la qualité de différentes
façons : bruit 50 Hz, sifflements, bruit d'ordinateur, coupure basse ou haute fréquence, parasites
divers, résonnance, amplification de certaines bandes de fréquences. Cette grande variabilité de
conditions d’enregistrement constitue un défi pour l’interprétation des résultats issus d’outils
d’évaluation objectifs, dans la mesure où le bruit, la faible dynamique, les interférences diverses
influent sur les résultats eux-mêmes. Nous pouvons ainsi tester les limites des outils et évaluer les
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biais méthodologiques de la collecte des données, permettant de développer un regard critique sur
les résultats des indicateurs recueillis en situation clinique.
1.3. Protection de l’identité des patients
Avant de procéder aux enregistrements, il est demandé à chaque patient de lire, compléter et signer
un consentement écrit pour droits de recherche, dont le texte a été négocié avec le représentant
CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) de l’hébergeur de la base de données.
L’idée du texte est de s’assurer que toutes les précautions ont été prises pour qu’aucune donnée
permettant une identification précise du patient ne sorte du cabinet d’orthophonie, tout en
acceptant que les échantillons de son soient bien exploités librement à des fins de recherche
orthophonique.
De ce fait, les phrases complètes, qui permettaient une identification potentielle du patient, sont
proscrites. Toute portion de dialogue présente dans les échantillons sonores fournis par les
orthophonistes sera aussi éliminée, avant de procéder à la mise en ligne. Seul le codage des fichiers
permet de remonter à l’orthophoniste qui a procédé à l’enregistrement, qui elle seule connaît les
données personnelles du patient.
1.4. Protocole
Afin d'exploiter les fichiers sons avec VOCALAB dans les meilleures conditions, les recommandations
précises sont spécifiées et concernent le réglage de la carte son, le codage du nom du fichier. Une
fiche fournit des explications sur la consigne adressée au patient et sur les modalités de passation.
Enregistrement Consigne Conseils Justification
/a/ " pouvez-vous faire un "a" tenu bien sonore, assez long, et le plus joli possible
pas de
démonstration
préalable pour ne
pas influencer la
hauteur
Le /a/ est très naturel et il existe
dans toutes les langues du monde. Il
n'offre aucune "béquille
articulatoire", est très couramment
utilisé dans les études. Le /a/
impliqué met déjà le patient dans
une posture "engagée" et donc
l'incite à une certaine "performance"
(qualité, durée, intensité)
Sirène
"Pouvez-vous faire une sirène qui monte et qui descend la plus jolie possible, vous pouvez en faire une deuxième en essayant d'aller encore plus haut et encore plus bas comme ceci
Faire entendre la
sirène pré-
enregistrée
La sirène permet d'avoir une idée
des performances en hauteur du
patient, du passage de mécanismes.
La voyelle /a/ est plus informative
que le /ou/. Cependant, la sirène sur
/ou/ est plus confortable et permet
au patient de mieux explorer son
étendue vocale. Le deuxième essai
peut lui permettre d'améliorer ses
performances.
Table 2 : Protocole utilisé pour enregistrer les voix des patients, portant sur une voyelle /a/ et une sirène
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Le choix du protocole et des consignes a fait l’objet de plusieurs discussions et ajustements dans
l'équipe de recherche. Pour que les comparaisons soient valides, il était indispensable de conserver
les mêmes consignes et le même matériel phonétique d’un enregistrement à l’autre. Un consensus a
été trouvé sur le fait que le phonème [ou] est très spontanément utilisé pour la sirène car il offre une
impédance ramenée sur le larynx relativement élevée, ce qui met le patient en situation de confort
et lui permet de balayer plus aisément son étendue vocale.
1.5. Enregistrement et Mise en ligne
Afin d’assurer la cohérence et une certaine homogénéité de la base de données, l’ensemble des échantillons sonore subit un traitement identique, décrit à la figure 1. L’orthophoniste enregistre la voix du patient selon le protocole défini dans le tableau précédent. Il transmet à l’administrateur les informations nécessaires pour le codage du fichier. Celui-ci ajoute les informations sur un tableau de suivi. Après écoute, l’administrateur décide ou non de la mise en ligne du fichier, après une phase d’égalisation, de découpage de la partie pertinente, et un éventuel nettoyage de bruits ou de voix parasites.
Figure 1 : protocole de mise en ligne de fichiers de voix dans la base de données
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Figure 2: Fichier de voix nécessitant une égalisation (voix trop faible) et la sélection de la portion de voyelle
pertinente (ici la partie centrale)
La figure 2 donne l’exemple d’un fichier de voix comportant 3 portions dont seule la partie centrale
est intéressante, et nécessitant une amplification car le niveau sonore est ici trop faible. Une
vérification visuelle est aussi faite sur la détection du fondamental de la voix, dont dépend
grandement la fiabilité des calculs des indicateurs de pathologie de la voix. Les noms de fichiers sont
codés selon une terminologie précise, afin de faciliter leur exploitation. Les noms de fichier
comportent des informations de type <orthophoniste>, <numéro>, <type de son>,
<avant/pendant/après rééducation>, <sévérité>, <nomenclature>, <genre>, <âge>. La sévérité est un
indicateur du grade de pathologie selon les repères VHI (Jacobson, 1997) (40VHI = 40 sur l'échelle
Voice-Handicap-Index), auto-évaluation VOCALAB (Sicard, et Menin-Sicard, 2013a) (12AE = 12 sur
l'échelle d'auto-évaluation) ou GRBAS (Hirano, 1981) (3GR = 3 sur l'échelle Grade, Rough, Breathy,
Asthenic, Strained). Le VIH et la GRBAS sont précisément décrits dans un autre article de ce numéro.
Les pathologies associées à chaque fichier sont décrites au moyen d'une nomenclature inspirée de
l'ouvrage de Verdolini (Verdolini, 2006). Par exemple "SP001-a-avant-12AE7120F44.WAV" fait
référence à l'enregistrement par l’orthophoniste d’initiales « SP » du patient 001, pour un son /a/,
avant rééducation. L'auto-évaluation est chiffrée à 12 (12AE), le patient souffrant de la pathologie
7120 (Paralysie unilatérale du nerf laryngé). Il s'agit d'une femme de 44 ans (F44).
L’exploitation de la base de données de voix par les logiciels PRAAT et VOCALAB, ainsi que la fusion
des données et le calcul statistique sont décrits à la figure 3.
Figure 3: Principe d’exploitation de la base de données de voix avec les logiciels PRAAT et VOCALAB à des fins de
comparaisons statistiques
Les enregistrements de voix ont été placés sur un serveur de l’INSA de Toulouse (Sicard, 2012),
permettant un libre accès pour les orthophonistes, sans création de mot de passe. La page se
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présente sous la forme de la figure 4. Le classement est effectué par type de pathologie, avec le
codage associé (Verdolini, 2006), suivi de l’âge et du sexe du patient. Les sons avant et après
rééducation sont ensuite mis en ligne, avec un commentaire très succinct. Pour certains cas, une
fiche récapitulative complète l'enregistrement et comprend : notes sur le bilan initial, des axes
thérapeutiques et un avis sur les indicateurs avant/après rééducation, selon le formalisme décrit à la
section 2 « Formalisation de la fiche ».
Figure 4 : Base de données de cas de voix pathologiques et explication des informations du tableau
1.6. Outil Statistiques
Un outil de calcul statistique a été implémenté dans VOCALAB en support au développement de la
base de données. Sa vocation première est de vérifier la cohérence de la base de données et de
générer des illustrations simples afin d’identifier rapidement des échantillons sonores singuliers,
permettant de remonter ainsi à d’éventuelles erreurs d’enregistrement, de codage, de mise en
forme, ou encore à des défauts dans les calculs des indicateurs. L’outil permet aussi d'une part
d’extraire des tendances sur un grand nombre de cas de voix, et d'autre part de les comparer à la
littérature.
L’outil de calcul statistique de VOCALAB est décrit à la figure 8. Il a été intégré à la médiathèque, et
dispose de tous les fichiers de voix avant et après rééducation, ainsi que les voix normales telles
qu’elles apparaissent en ligne (Sicard et Menin-Sicard, 2012). L’utilisateur peut choisir parmi un choix
d’indicateurs en X et en Y, obtenant ainsi des détails sur le coefficient de corrélation. Chaque point
de l’espace X,Y correspond à un fichier. La distribution statistique de la variable choisie à l’axe X (ici
l’instabilité en hauteur sur tout le son évaluée par VOCALAB) apparaît au-dessus du nuage de points.
Le coefficient de corrélation évolue de 0 (aucune corrélation) à 1 (corrélation totale).
Différentes sélections de types d’échantillons sont possibles, telles que les classes de pathologies, ou
encore le sexe du patient. Dans le cas de la figure 8, l’indicateur d’instabilité en hauteur est comparé
à l’indicateur d’altération de l’attaque. La distribution des points sur l’axe horizontal se présente sous
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une forme de gaussienne centrée autour de 1.3 environ. Le coefficient de corrélation entre les deux
variables est évalué à 0.61, ce qui indique une corrélation significative (car au-dessus de 0.5).
Figure 8: Outil de calcul statistique dans VOCALAB
1.7. Synthèse des résultats Une étude sur 150 cas de voix pathologiques a été conduite dans le cadre de l’ERU 15 du laboratoire
LURCO, dans le but d’évaluer la pertinence des marqueurs de pathologie de la voix existant dans
PRAAT et proposés dans VOCALAB. Le logiciel PRAAT a été programmé pour permettre une
extraction automatique des indicateurs de type Jitter, Shimmer et Harmonic/Noise Ratio (HNR) sur
tous les échantillons. Les indicateurs de VOCALAB ont porté sur l’intégralité du son ou sur une
portion de 1 seconde après l’attaque. Nous avons pu confirmer que les indicateurs au sein d’une
même famille de Jitter et Shimmer sont très fortement corrélés, mais aussi que le Shimmer et HNR
dans PRAAT sont fortement corrélés, alors qu’ils ne ciblent pas les mêmes phénomènes (Sicard,
Menin-Sicard, Perrière, 2013).
Nous avons aussi mis en évidence une grande sensibilité des algorithmes de détection d’amplitude
au bruit d’enregistrement. De manière surprenante, les indicateurs de hauteur de VOCALAB et Jitter
de PRAAT sont peu corrélés, probablement parce que VOCALAB mesure le moyen et long terme,
PRAAT le court terme. Une bonne connaissance du paramétrage des outils PRAAT s’avère donc
nécessaire pour améliorer les résultats d’extraction du fondamental pour des pathologies sévères.
Une calibration des indicateurs VOCALAB d’après PRAAT, qui avait été envisagée au commencement
de l’étude, s’avère peu pertinente, les indicateurs étant difficilement comparables, à l’exception du
rapport signal/bruit.
Nous avons aussi utilisé une trentaine de cas de voix normales (12 H, 18 F, âges variant de 15 à 80
ans). Le critère retenu pour considérer une voix comme normale consistait à n’avoir qu’un indicateur
sur cinq au-dessus du seuil de pathologie, l’échantillon sonore étant jugé par ailleurs comme normal
à l’audition par un orthophoniste spécialisé dans la prise en charge des troubles de la voix. Cette base
de voix normales a permis notamment de vérifier que chaque indicateur dans VOCALAB mesurait un
phénomène bien différencié (Sicard, 2013a).
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Les choix effectués sur les indicateurs de VOCALAB ont été plutôt confortés que remis en question
par cette étude de par leur pertinence pour les choix d’axes thérapeutiques, leur cohérence avec
l’évaluation perceptive et l’auto-évaluation telle qu’abordée dans (Menin-Sicard, 2013). Cependant,
la prise en compte des indicateurs dans les bilans et dans les rééducations est à relativiser du fait de
la variabilité des valeurs obtenues selon les enregistrements, les chaînes d’acquisition, le matériel
utilisé ou simplement le mode opératoire du clinicien.
2. Formalisation de la fiche
2.1 Motivations
La nécessité d’élaborer une fiche analytique synthétisant les différents indicateurs objectivés par le
logiciel s’est rapidement imposée. D’une part elle représente un support structuré et synthétique
ayant pour fonction de proposer une alternative au compte-rendu de bilan classique en formalisant
les données sous forme de tableaux facilement lisibles. D’autre part elle permet une traçabilité des
résultats obtenus au moment de l’évaluation initiale en fournissant une grille d’analyse tout au long
de la rééducation vocale, un repérage normatif de l’image de la voix à un moment T. En outre, cette
grille nous semble d’autant plus pertinente qu’elle permet aux orthophonistes d’affiner leur vision de
la pathologie afin de les aider à mettre en place des axes thérapeutiques ciblés et plus adaptés aux
marqueurs pathologiques.
Dans la logique de cette démarche, nous avons établi un comparatif "avant-après" afin d’estimer les
résultats obtenus dans le temps, et par conséquent, l’efficacité de la prise en charge. Pourquoi
certains indicateurs s’améliorent-ils, et d’autres non ? La direction prise par le thérapeute est-elle la
bonne ? La formalisation de la fiche renvoie à la pertinence des indicateurs et à l’importance
accordée à ceux-ci dans la prise en charge, permettant une hiérarchisation et une éventuelle
réorientation des axes thérapeutiques en fonction des progrès. Par ailleurs, l’objectivation des
résultats constitue une source de motivation et de réassurance considérable du côté du patient qui
voit ainsi son investissement récompensé.
La mise en parallèle du qualitatif et du quantitatif, du perceptif et de l’acoustique est également au
cœur de notre réflexion puisque les corrélations entre ces différents domaines sont évaluées. Il reste
en effet primordial d’étayer et d’enrichir les indicateurs par une réflexion tant du côté du thérapeute
que de celui du patient. L’auto-évaluation est-elle en rapport avec les résultats obtenus ? La
perception subjective du rééducateur diffère-t-elle de l’analyse objective et pourquoi ? Chaque item
est donc complété par des remarques qualitatives permettant d’établir des liens entre les indicateurs
et la démarche clinique grâce aux compétences du rééducateur.
2.2 Structure
La fiche proposée (voir détail en Annexes 2 à 7) se découpe en quatre parties.
� Une première partie : la fiche d'analyse vocale (Annexe 2) regroupe des informations générales sur le patient et spécifiques sur le trouble vocal. Elle comprend :
1. L’anamnèse incluant les références du patient et sa pathologie ; le motif de consultation et la plainte.
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2. La conclusion de l’examen laryngé réalisé par l’ORL ou le phoniatre. 3. L’histoire de la maladie rendant compte de l’état de santé, des traitements en cours,
des épisodes antérieurs, du contexte d’apparition du trouble. 4. Les troubles associés en fonction des différentes sphères médicales associées au
trouble vocal. 5. Les habitudes de communication indiquant le niveau d’utilisation et d’éducation
vocale ; la variabilité du trouble ; les facteurs favorisants ou déclenchants. 6. Le profil psychologique établi autour des répercussions liées au trouble, du
comportement du patient face au trouble ainsi que de sa motivation et son adaptation à la rééducation.
7. L’examen du geste vocal prenant en considération la posture et le mode respiratoire du patient, le niveau d’articulation et la fluence.
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� Une seconde partie (Annexe 3) axée sur l’auto-évaluation et la perception subjective du clinicien qui propose :
1. L’auto-évaluation du confort, des performances, de la qualité, de l’endurance et de l’adaptation de la voix en fonction d’un score de 0 à 25. La gêne étant alors évaluée selon 5 grades : absence de gêne ; gêne discrète ; gêne modérée ; gêne marquée ; gêne sévère.
2. La corrélation entre l’analyse subjective de l'orthophoniste et objective par logiciel
permettant d’établir le lien entre les indicateurs et la perception du thérapeute
� Une troisième partie (Annexe 4) synthétisant les différents indicateurs de pathologie pour lesquels la norme est ramenée à 1 dans un souci de facilité d’utilisation :
1. Le rendement laryngé avec le temps phonatoire, le rapport s/z, l’attaque et l’endurance.
2. La stabilité de hauteur et d’amplitude reprenant les variations du Fo à moyen terme (jitter et portrait de phase) et les variations de la puissance à moyen terme (shimmer).
3. La hauteur comprenant le calcul du fondamental usuel moyen, l’étendue vocale et la présence des 2 mécanismes laryngés.
4. La dynamique vocale avec le phonétogramme permettant d’estimer l’étendue
vocale dans les différents modes de production (murmure, conversation, voix impliquée, appel).
5. Le timbre et la richesse harmonique avec le ratio bruit/signal qui détermine la propreté du son ; le ratio Fo/harmonique qui définit la répartition d’énergie entre le fondamental et les deux premiers formants ; le timbre extra-vocalique et l’utilisation des résonateurs.
� Une dernière partie synthétisant les troubles observés et les axes thérapeutiques possibles sous forme de tableau.
TROUBLES OBSERVES RESULTATS OBTENUS
Méconnaissance de l’hygiène vocale Recherche de stratégies (gestuelles, acoustiques, vocales, etc.)
permettant de s’adapter à l’environnement tout en préservant une
bonne hygiène vocale.
Absence de prise en compte des facteurs favorisants le malmenage et/ou
surmenage vocal.
Gestion et anticipation des facteurs à risque et des signaux d’alarme.
Affaissement thoraco-scapulaire.
Protraction du menton et tensions péri-laryngées.
Correction de la posture et du centrage à la phonation.
Manque d’endurance et mauvais rendement vocal. Canalisation de l’énergie vocale et gestion de celle-ci dans un contexte
d’économie et de confort (notion de rendement et d’efficacité ;
suppression du forçage ).
Dynamique vocale et intensité adaptable à la situation de
communication.
Dysfonctionnement glottique et réduction du temps phonatoire. Amélioration du fonctionnement glottique par une meilleure gestion
pneumo-phonique.
Augmentation de la surface d’accolement pour limiter la déperdition
d’air.
Mauvaise coordination pneumo-phonique.
Absence de gestion du du souffle.
Reprises inspiratoires actives et rares.
Utilisation du soutien costo-abdominal en voix impliquée.
Mobilité diaphragmatique et reprises inspiratoires passives.
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Instabilité de l’attaque avec glissement de hauteur par mauvaise
canalisation du geste.
Recherche de l’équilibre d’accolement glottique à l’attaque.
Tonification du larynx pour adduction résistante aux fortes pressions
sous-glottiques.
Instabilité du fondamental mal compensée par la patiente en terme
d’équilibre des pressions sous et sus-glottiques.
Equilibre des 3 étages : respiratoire (pression sous-glottique), vibratoire
(accolement) et résonantiel (impédance) afin de stabiliser la hauteur et
l’intensité.
Aggravation du fondamental avec placement du son en gorge. Fondamental usuel dans la zone de confort en voix conversationnelle et
en voix impliquée.
Déplacement de l’étendue vocale vers le grave. Glissades descendantes à partir du haut medium.
Rupture dans la zone de passage. Lignes mélodiques, intonatives dans les 2 mécanismes.
Dynamique vocale tronquée dans les extrêmités. Indépendance des différents paramètres vocaux (hauteur, intensité).
Récupération d’une dynamique complète.
Homogénéisation de la zone de passage.
Timbre rauque et soufflé. Recherche d’un timbre non bruité avec les stratégies de placement de son
(paille, nasales, fricatives sonores, etc.)
Absence de formant extra-vocalique.
Concentration de l’énergie sur le Fo.
Enrichissement du timbre, antériorisation de l’articulation et
optimisation de la résonance.
Forçage vocal avec comportement hyperkinétique et augmentation de la
pression sous-glottique pour parler plus « fort ».
Distinction puissance-volume pour parler plus « ample »
Apprentissage de la projection confortable en contexte bruyant.
Débit rapide, rhèses trop longues Ralentissement du débit, ajustement des rhèses.
Table 3 : Synthèse des troubles observés et axes thérapeutiques possibles
La création de cette fiche permet d’extraire un canevas commun aux orthophonistes, conduisant
ainsi à un partage de critères d’analyse définis, à une homogénéisation des pratiques indispensable à
la transmissibilité des données, et à une présentation synthétique du projet thérapeutique.
Discussion La construction de cette base de données s’inscrit dans la dynamique actuelle des pratiques de
mutualisation des données à des fins de recherche. Grâce à cette synergie, nous allons plus loin dans
la démarche clinique. Grâce au système de fiche synthétique, nous proposons pour la première fois
de mettre à disposition une expertise thérapeutique ciblé et spécifique à chaque cas. Cette base de
données qui s’enrichira au fil du temps est une ressource fondamentale pour la recherche en
orthophonie. Ce travail permet avec le recul d’avoir un avis objectif sur la pertinence du choix des
indicateurs (détecteur d’attaque, pauvreté harmonique, instabilité à moyen terme).
La comparaison avant/après permet de légitimer l’intervention orthophonique et de valider la
démarche thérapeutique. La mutualisation de l’expertise orthophonique est ainsi initiée.
Ce travail permet en outre une analyse comparative des marqueurs sur une sélection de voix et un
prototypage par pathologie. Etudier les limites des indicateurs, notamment dans le cas de voix très
altérées est aussi un objectif de l’ERU.
Notre objectif principal est l’élargissement des cas couverts par la base de données, en faisant appel
aux orthophonistes pour augmenter la diversité des cas traités en termes d’âge, de sexe et de
pathologie. Le point novateur reste la comparaison des voyelles et sirènes avant et après
rééducation.
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Conclusion Dans cet article, nous avons décrit une démarche originale de construction d’une base de données
couvrant un large éventail de pathologies de la voix, sous forme d’échantillons sonores avant et
après rééducation orthophonique. Nous avons explicité les étapes de construction de cette base de
données, en particulier la nomenclature, le respect de la confidentialité et les étapes de vérification
de la cohérence des informations mises en ligne. Nous avons ensuite détaillé un format de fiches
permettant de synthétiser les résultats d’analyse, les axes thérapeutiques, et l’exploitation des
indicateurs tels que ceux fournis par VOCALAB et PRAAT. Puis nous avons discuté de l’intérêt de cette
mutualisation des données et d'expertise orthophonique qui concerne l’accompagnement des
patients porteurs de pathologie vocales variées.
Du point de vue des perspectives, nous souhaitons développer les échanges et enrichir les fiches
pratiques, au travers de la mise en commun d’expérience en termes d’axes thérapeutiques, dans une
démarche coopérative et fédératrice. La pluralité des approches est aussi encore peu abordée, et
devrait se développer dans le futur. Enfin nous envisageons de repositionner la base de données
dans un contexte international, avec une traduction de certaines pages web en Anglais. Les
échantillons /a/ et sirène étant assez génériques, ils pourraient à l’avenir être ouverts aux
orthophonistes hors de la sphère francophone. Elle s’enrichira progressivement grâce à la
coopération de plusieurs experts dans le domaine qui accepteront de coopérer. Plus le nombre de
cas sera important et plus les indicateurs seront précis et pertinents.
Nous envisageons par la suite une étude de l’évolution des marqueurs au cours de la rééducation
pour un choix restreint de pathologie, probablement les plus fréquentes et l’élaboration de profils
types (Z score) en fonction des pathologies. Cette base de données offre un vaste champ
d’investigation et d’études possibles à savoir la corrélation entre auto-évaluation et marqueurs
objectifs et corrélations entre marqueurs objectifs et analyse perceptive. Ces recherches feront
l’objet de conférences et de publications dans des revues scientifiques. Elles ouvrent un large champ
d’application pour des études sur la voix dans le cadre des mémoires de fin d’étude.
Références
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15
Annexe 1 - Nomenclature
La nomenclature des pathologies de la voix proposée ci-dessous est une traduction et adaptation de la classification publiée dans l'ouvrage de Katherine Verdolini "Classification Manual For Voice Disorders, Volume 1", Psychology Press, 2006. Un découpage en 8 grandes sections et 25 sous-section est ici proposé.
0000 VOIX NORMALE
1000 MALADIES DU LARYNX STRUCTUREL 1100 Lésions laryngées malignes 1110 Lésions malignes des cordes vocales 1120 Dysplasie / carcinome in situ 1130 Maladie malignes du larynx
1140 Maladie malignes du pharynx 1200 Anomalies de la propria et l'épithélium des cordes vocales 1210 Lésions bénignes de la lame de la corde vocale 1211 Nodules des cordes vocales 1212 Masse fibreuse - sous-épithéliale 1213 Masse fibreuse - Ligament 1214 Polype(s) des cordes vocales 1215 Kyste épidermoïde - sous-épithéliale 1216 Kyste épidermoïde - Ligament 1217 Sulcus glottidis - vergéture des cordes vocales 1218 Fuite glottique
1219 Glotte ovalaire 1220 Oedème de Reinke ou pseudomyxome des cordes vocales 1230 Cicatrices des cordes vocales 1240 Granulome cordes vocales 1241 Granulome cordes vocales sans rapport avec l'intubation 1242 Granulome cordes vocales connexe à l'intubation 1243 Granulome cordes vocales connexe à un ulcère 1250 Kératose, Leucoplasie, érythroplasie 1260 Papillomatose 1270 Sténose sous-glottique 1280 Sténose glottique
1290 Sténose laryngé 1300 Anomalies vasculaires des cordes vocales 1310 Hémorragie des cordes vocales 1320 Varices ou ectasie des cordes vocales 1400 Les changements affectant la maturation de la Voix 1410 Membranes congénitales (synéchie) 1420 Syndrome du cri du chat 1430 Laryngomalacie 1440 Puberfonie, mue faussée 1450 Presbyphonie
2000 INFLAMMATION DU LARYNX 2100 Cricoaryténoïdien arthrite, arthrose 2200 Laryngite aiguë 2300 Reflux gastro-oesophagien 2400 Sensibilité Chimique - Syndrome irritable du Larynx
3000 TRAUMATISME, BLESSURE OU OPERATION DU LARYNX 3100 Traumatisme laryngé interne 3110 Traumatisme de la muqueuse du larynx (chimique ou thermique) 3120 Lésions de la muqueuse du larynx par intubation ou extubation 3130 Déplacement de l’aryténoïde
3140 Radio Thérapie Externe (RTE) du larynx
3150 Radio Thérapie Externe (RTE) des cordes vocales
3200 Traumatisme laryngé externe
3300 Opérations du Larynx
3310 Laryngoplastie
3320 Laryngectomie
3321 Laryngectomie fronto-latérale 3322 Laryngectomie frontale antérieure 3323 Hémi-laryngectomie 3324 Laryngectomie supra-glottique 3325 Laryngectomie supra-cricoïdienne
16
3326 Laryngectomie totale 3327 Pharyngo-laryngectomie totale 3328 Pharyngo-laryngectomie totale circulaire
3330 Crico-Hyoïdo-Epiglotto-Pexie (CHEP)
4000 CONDITIONS SYSTEMIQUES INFLUANCANT LA VOIX 4100 Endocrine 4110 Hypothyroïdie 4120 Hyperthyroïdie 4130 Déséquilibre des hormones sexuelles 4140 Anomalies de l'hormone de croissance 4200 Immunologique 4210 Maladies allergiques des voies respiratoires supérieures 4220 VIH et SIDA 4230 Syndrome de fatigue chronique 4240 Lupus érythémateux disséminé 4250 Syndrome de Sjogren 4260 Sclérodermie 4270 Wegener 4300 Changements affectant l'appareil locomoteur de la voix 4310 Trauma en lien avec une sur-utilisation 4320 Fibromyalgie 4330 Ehler Danlos 4400 Déshydration
5000 TROUBLES AERODIGESTIFS AFFECTANT LA VOIX 5100 Maladies respiratoires affectant la voix 5110 Asthme 5120 Maladie pulmonaire obstructive chronique - MPOC 5200 Troubles gastrique 5210 Reflux gastro-œsophagien 5300 Maladies infectieuses aéro-digestives supérieures 5305 Laryngotrachéobronchite 5310 Coqueluche
5315 Diphtérie 5320 Pneumonie 5325 Sinusite infectieuse 5330 Tuberculose 5335 Infection des voies respiratoires supérieures 5340 Épiglottite aiguë 5345 Syphilis 5350 Sarcoïdose 5355 Scleroma laryngé (Klebsiella Rhinoscleromatis) 5360 Lèpre (affectant le larynx) 5365 Actinomycose 5400 Infections mycosiques 5410 Blastomycose 5420 Histoplasmose 5430 Candidose 5440 Coccidioïdomycose
6000 TROUBLES PSYCHIATRIQUES ET PSYCHOLOGIQUES AFFECTANT LA VOIX 6100 Troubles somatoformes 6110 Troubles de somatisation 6120 Troubles de conversion 6130 Troubles de douleur 6140 Hypocondrie 6200 Trouble factice 6300 Mutisme sélectif 6400 Anxiété 6410 Stress post-traumatique 6420 Trouble d'anxiété généralisée 6500 Troubles de l'humeur 6510 Dépression 6520 Trouble bipolaire I 6600 Troubles de l'identité 6700 Polydipsie psychogène 6800 Fluctuations psychologiques
7000 TROUBLES NEUROLOGIQUES AFFECTANT LA VOIX 7100 Lésion du système nerveux périphérique - (ex: après thyroïdectomie) 7110 Lésion du nerf laryngé 7120 Paralysie récurrentielle unilatérale du nerf laryngé 7130 Paralysie récurrentielle bilatérale du nerf laryngé
17
7140 Paralysie du nerf vague (X) 7150 Myasthénie 7160 Neuropathie périphérique 7170 Tremblement physiologique 7200 Troubles du mouvement affectant le larynx 7210 Dysphonie spasmodique en adduction (arrêts involontaires) 7220 Dysphonie spasmodique en abduction (voix très faible) 7230 Dysphonie spasmodique mixte 7240 Tremblement dystonique affectant la voix 7250 Tremblement généralisé affectant la voix 7260 Dystonie orofaciale (syndrome de Meije) 7270 Dyskinésie tardive 7280 Syndrome de Gilles de La Tourrett 7300 Troubles du système nerveux central 7305 Sclérose latérale amyotrophique (SLA) 7310 Syndrome de Wallenberg 7312 Syndrome de la moelle épinière 7315 Maladie de Parkinson 7320 Atrophie multisystématisée 7325 Paralysie supranucléaire progressive 7330 Sclérose en plaques 7335 Troubles cérébelleux 7340 Chorée de Huntington 7345 Paralysie récurrentielle du nerf laryngé central 7350 Myoclonie
8000 AUTRE TROUBLES AFFECTANT LA VOIX 8100 Dysphonies dysfonctionnelles
8110 Dysphonie par hypertension musculaire 8111 Dysphonie par hypertension musculaire - serrage 8112 Dysphonie par hypertension musculaire - voix des bandes 8120 Dysphonie par hypotension musculaire 8130 Dysphonie avec tension variable 8140 Dysphonie vestibulaire
8150 Dysphonie dysodie 8200 Trouble de mouvement vocal paradoxal
8300 Dysfonctionnement vélaire
8310 Luette bifide
8320 Plastie vélaire
8330 Syndrome de Di Georges
8400 Surdité 8410 Surdité non appareillée 8420 Surdité avec amplificateurs 8430 Implant cochléaire
9000 AUTRES TROUBLES VOCAUX 9010 Bégaiement 9015 Bredouillement 9020 Dysfonctionnement vélaire
18
Annexe 2 : Fiche d’analyse vocale - informations générales et spécifiques sur le trouble vocal
REFERENCES DU PATIENT
Sexe Femme
Age 50 ans
Profession Aide-soignante
Pathologie Kissing nodules
Nomenclature 1211
MOTIF DE CONSULTATION ET PLAINTE
Enrouement, gêne et fatigue vocale depuis deux mois. Douleurs laryngées en fin de journée. Gêne et fatigue vocales conséquentes dans le
cadre du travail.
EXAMEN LARYNGE
Kissing nodules sur le tiers antérieur des cordes vocales. Il est noté une raideur muqueuse et un défaut d’accolement sur la portion
antérieure.
HISTOIRE DE LA MALADIE
Bon état de santé général. Mode d’apparition insidieux avec tout de même un épisode de laryngite à l’origine. Absence de traitements en
cours et d’antécédents particuliers.
TROUBLES ASSOCIES
Fragilité ORL avec épisodes de laryngites fréquents. RGO traité. Serrage de l’ATM et douleurs cervicales.
HABITUDES DE COMMUNICATION
Utilisation privée familiale (2 enfants). Utilisation professionnelle intensive au sein d’un service hospitalier. Aucune éducation vocale
particulière. Dégradation vocale en fin de journée. Facteurs favorisants : obligation de parler au téléphone, donner des consignes à
distance, couvrir un bruit de fond, s’adresser à des malentendants
GESTE VOCAL
AVANT APRES
POSTURE � léger affaissement thoraco-scapulaire avec blocage
diaphragmatique
� extension du cou vers l’avant avant accentuation de la
lordose cervicale
� tensions péri-laryngées à la phonation
� correction de l’axe postural avec récupération d’une
verticalité souple au repos et à la parole
� ancrage et utilisation des muscles profonds sans
sollicitations musculaires superficielles.
RESPIRATION � souffle thoraco-scapulaire
� resprises inspiratoires actives et rares
� mauvaise coordination pneumo-phonique
� mise en place du souffle costo-abdominal pour la voix
impliquée
� reprises inspiratoires plus fréquentes et passives
� bonne coordination pneumo-phonique
INTELLIGIBILITE
ARTICULATION
� tendance à accentuer les consonnes toniques
� serrage de l’ATM qui empêche la résonance des voyelles
� bonne intelligibilité
� mâchoire relâchée et utilisation des résonateurs
FLUENCE � débit rapide en utilisation vocale spontanée � ralentissement du débit par la gestion du souffle et la pose
de voix sur les voyelles
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Annexe 3 : Fiche d’analyse vocale - Auto-évaluation du patient et corrélation avec la perception subjective du clinicien
AUTO-EVALUATION
AVANT APRES
20-25 15-20 10-15 5-10 0-5
Pas de gêne
vocale
Gêne discrète Gêne
modérée
Gêne marquée
Gêne
sévère
x
� plainte centrée autour du manque d’endurance, du mauvais
rendement vocal.
� bonne récupération fonctionnelle et absence de plainte.
20-25 15-20 10-15 5-10 0-5
Pas de gêne
vocale
Gêne discrète Gêne
modérée
Gêne marquée
Gêne
sévère
x
CORRELATION EVALUATION SUBJECTIVE-OBJECTIVE
ATTAQUE STABILITE
HAUTEUR
STABILITE
INTENSITE BRUIT
PAUVRETE
HARMONIQUE
avant après avant après avant après avant après avant après
EVAL SUBJECTIVE 1 0 1 0 1 0 1 0 1 1
INDICATEURS 1 0 1 0 0 0 1 0 0 0
CORRELATION
20
Annexe 4 – Fiche d’analyse vocale – Analyse objective
RENDEMENT LARYNGE
INDICATEURS NORME AVANT APRES
TMP /a/ n=10-15 10 15
� La mesure du temps phonatoire génère
un forçage vocal évident avec
comportement hyperkinétique.
� L’endurance vocale est bonne avec un
geste et un rendement adaptés.
RAPPORT S/Z /s/ et /z/ n=1
16/9 = 1.7
� dysfonctionnement glottique
16/15 = 1
ATTAQUE /a/ n=1 1.17 0.50
� L’attaque est instable avec glissement de
hauteur car la patiente canalise mal son
geste (forte énergie au démarrage).
� Le soutien costo-abdominal et la
gestion de l’énergie vocale permettent
un accolement doux et une attaque
stable.
ENDURANCE
CONSERVATION DE LA
STRUCTURE /a/
Maintien :
Détérioration :
� la fuite glottique génère un manque d’endurance et un
mauvais rendement vocal.
Maintien :
Détérioration :
� la régression des nodules permet un
accolement optimal et un
rendement adapté.
Figure A-1: Rendement laryngé
STABILITE
INDICATEURS NORME AVANT APRES
HAUTEUR /a/ n=1 1.21 0.61
� la qualité vibratoire est altérée et génère
une instabilité du fondamental mal
compensée par la patiente en terme
d’équilibre des pressions sous et sus-
glottiques.
� la régularité de l’ondulation muqueuse
ainsi que l’équilibre des pressions
permettent de récupérer un Fo stable.
21
PORTRAIT PHASE � Centre : signal stable
en hauteur (vert)
� Un peu éloigné, un
signal moins stable
(jaune)
� Encore plus éloigné,
un signal fortement
éloigné (rouge)
� comportement légèrement chaotique
signifiant une variabilité du Fo.
� le centrage est normal.
INTENSITE /a/ n=1 0.64 0.42
� le niveau de stabilité d’amplitude est
normal mais à replacer dans un contexte
de forçage au détriment du confort vocal.
� le geste vocal est maintenant aisé et
confortable.
/a/ tenus avant-après
Figure A-2: Stabilité de hauteur et d’intensité
HAUTEUR
INDICATEURS NORME AVANT APRES
FONDAMENTAL
USUEL MOYEN
Voix conv.
n= 170-250 Hz
190 Hz
� aggravation du
fondamental ;
placement du son sur la
gorge.
260 Hz
� normalisation du Fo ; utilisation des
résonateurs.
ETENDUE VOCALE
Voix conv.
n=220-588 Hz
120-490 Hz 130-500 Hz
Voix
chantée
(sirène)
130-330 Hz
� étendue vocale
déplacée vers le bas.
� forçage pour atteindre
150-360 Hz
� le Fo max reste relativement grave mais cette
fois-ci le son est placé.
� gain de 2 demi-tons vers le haut de l’étendue
22
le Fo max avec
décrochage.
� sirène descendante très
bruitée.
vocale.
� propreté spectrale et timbre clair.
MECANISMES
LARYNGES
Méc. 1 : Méc. 2 :
� impossibilité de passer en cordes fines pour produire la voix
de tête ; « couac » dans la zone de passage.
Méc. 1 : Méc. 2 :
� inhibition à poursuivre vers les aigus par
manque d’habitude mais belle continuité
dans la zone de passage.
Sirènes sur /a/ avant-après (après 20 séances)
Figure A-3: Analyse de la hauteur et illustration des progrès pour une sirène (avant/après rééducation)
23
DYNAMIQUE VOCALE AVANT APRES
PHONETOGRAMME
Sirènes sur /ou/,
voix murmurée,
parlée, appel.
� perte des extrêmités fréquentielles ;
impossibilité de dépasser la zone de
passage ; projection difficile.
� récupération d’une dynamique plus
harmonieuse et complète même si la
voix de tête reste difficile.
Figure A-4: Analyse de la dynamique vocale avant/après rééducation
TIMBRE ET QUALITE HARMONIQUE
INDICATEURS NORMES AVANT APRES
PROPRETE
RATIO BRUIT/SIGNAL
/a/ n=1
1.31
0.64
� traces parasites en particulier en fin
de production.
� mauvais accolement dû aux nodules,
trouble de gestion du souffle et
absence d’utilisation des résonateurs
induisent un timbre rauque et
soufflé.
� récupération d’un accolement optimal
et d’une bonne vibration cordale.
� timbre clair et propre.
FO/HARMONIQUES
/a/ n=1
� la structure formantique du /a/ est
respectée et l’énergie répartie sur les
2 premiers harmoniques au début de
la production.
� concentration de l’énergie sur le Fo à
partir de 4 secondes au détriment des
harmoniques.
� la répartition est mieux répartie sur la
durée puisque la patiente canalise son
geste et son rendement dans le
temps.
TIMBRE EXTRA-VOCALIQUE:
F4 /a/
Présent : Absent :
� le /a/ n’est pas impliqué car la patiente utilise peu ses
résonateurs.
Présent : Absent :
� toujours peu d’enrichissement du
timbre sur un son tenu mais bonne
optimisation fonctionnelle à la
parole.
Figure A-5: Analyse du timbre de la voix
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